Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 13 novembre 2025, 24-11.221, Inédit
La clause de non-garantie des vices cachés insérée dans un acte de vente ne produit pas d’effet lorsque les désordres affectant l’immeuble trouvent leur origine dans des travaux réalisés personnellement par le vendeur.
En l’espèce, les acquéreurs d’une maison d’habitation, se plaignant de multiples désordres révélés après la vente, ont assigné leurs vendeurs à l’issue d’une expertise judiciaire. Ils ont agi sur le fondement de la garantie des vices cachés, sollicitant à la fois la résolution de la vente et l’allocation de dommages-intérêts.
Bien que l’acte de vente contienne une clause exonératoire de garantie, les juges du fond ont fait droit à leurs demandes. Ils ont relevé, d’une part, la gravité des désordres, lesquels portaient atteinte à la structure même de l’immeuble, et, d’autre part, le fait déterminant que les travaux à l’origine des vices avaient été exécutés par les vendeurs eux-mêmes. Il ressortait du dossier que ces travaux, réalisés sur une période de plus de dix ans, incluaient des interventions substantielles sur des éléments porteurs de la construction.
Dans ces conditions, les juges ont considéré que les vendeurs devaient être réputés avoir connaissance des vices affectant leur ouvrage, indépendamment de toute qualification de vendeur professionnel ou de compétences techniques particulières en matière de construction. Le pourvoi formé contre cette décision a été rejeté.
Cette solution s’inscrit dans une jurisprudence désormais bien établie de la Cour de cassation, selon laquelle la clause de non-garantie des vices cachés est inopposable au vendeur qui avait connaissance du vice au moment de la vente. Or, la Haute juridiction adopte une approche rigoureuse de la notion de « connaissance du vice ».
De manière constante, la Cour juge que le vendeur ayant lui-même réalisé des travaux affectant l’immeuble est présumé connaître les défauts résultant de ces travaux, même s’il n’est ni professionnel du bâtiment ni assimilable à tel. Cette présomption repose sur une logique de responsabilité personnelle : celui qui conçoit et exécute des travaux structurels ne peut ignorer les risques inhérents aux choix techniques opérés.
La jurisprudence opère ainsi une distinction claire entre :
- le vendeur profane n’ayant pas touché à l’immeuble, qui peut bénéficier de la clause exonératoire ;
- et le vendeur ayant réalisé des travaux, notamment structurels, qui se voit refuser le bénéfice de cette clause en raison de sa connaissance présumée des vices.
Cette position répond à un objectif de protection renforcée de l’acquéreur, tout en évitant qu’un vendeur ne se retranche derrière une clause contractuelle pour échapper aux conséquences de malfaçons qu’il a lui-même créées. Elle participe également d’une conception exigeante de la loyauté contractuelle, en sanctionnant toute asymétrie d’information née de l’intervention personnelle du vendeur sur le bien cédé.

