Les intérêts moratoires suivent le même régime fiscal que les dégrèvements auxquels ils se rapportent

Clara DUBRULLE
Clara DUBRULLE

Source : Conseil d’État, 9ème – 10ème chambres réunies, 28 janvier 2019, n° 406722

 

Les faits

 

A la suite d’une vérification de comptabilité, la société MACIF a fait l’objet de rappels de taxe assortis d’intérêts de retard au titre des exercices 1997 à 1999. Ces impositions et pénalités ont été mises en recouvrement en 2002 et la société MACIF les a déduites de son bénéfice imposable au titre de l’exercice clos la même année.

 

En 2006, la société a obtenu, par une décision judiciaire, le dégrèvement de l’ensemble des impositions et intérêts de retard qu’elle avait ainsi acquittés.

 

A la suite d’une nouvelle vérification de comptabilité au titre des exercices clos en 2005, 2006 et 2007, l’administration fiscale a réintégré dans ses bases imposables à l’impôt sur les sociétés, pour un montant de 2 206 000 euros, les intérêts moratoires que la société MACIF avait perçus en application de l’article L. 208 du livre des procédures fiscales lors en 2006 du dégrèvement des rappels de taxe et des intérêts de retard correspondants.

 

La société MACIF a contesté cette réintégration. Le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté les demandes de la société MACIF mais la Cour administrative d’appel de Versailles a réformé le jugement et prononcé la décharge des rappels d’impôts et cotisations résultant de la réintégration dans son résultat imposable des intérêts moratoires mentionnés ci-dessus.

 

Le ministre de l’action et des comptes publics se pourvoit en cassation contre cet arrêt.

 

La décision du Conseil d’Etat

 

Les contribuables qui obtiennent un dégrèvement d’impôt à l’issue d’une procédure contentieuse ont droit à des intérêts moratoires, que le dégrèvement soit consécutif à une instance devant les tribunaux ou prononcé par l’administration à la suite d’une réclamation.

 

Les intérêts sont liquidés jour par jour au taux de l’intérêt de retard sur la totalité des sommes remboursées. Ils courent depuis la date de paiement de l’impôt jusqu’au jour du remboursement. Ils ne sont pas capitalisés.

 

Selon la doctrine administrative, les intérêts moratoires ne sont pas imposables en principe. Toutefois, s’ils se rapportent à des dégrèvements obtenus dans le cadre d’une activité professionnelle et que les droits dégrevés sont eux-mêmes imposables (cas d’impositions antérieurement admises dans les charges déductibles), les intérêts sont imposables au même titre[1].

 

En l’espèce, le Conseil d’Etat considère que les intérêts moratoires assis sur des impositions dégrevées, ont pour seul objet de tenir compte de la durée pendant laquelle le contribuable a été privé des sommes correspondantes. Ainsi, ils ne sont que l’accessoire de ces sommes et doivent en conséquence être soumis au même régime fiscal que les dégrèvements.

 

Autrement dit, lorsque les impositions restituées à une entreprise sont incluses dans son résultat imposable (c’est le cas lorsque les impositions en cause ont été déduites lors de leur paiement), les intérêts moratoires qui lui sont versés doivent être également soumis à l’impôt. En revanche, les intérêts moratoires ne seront pas imposables si les droits restitués ne l’ont pas été (par exemple, l’impôt sur les sociétés n’est pas déductible, dès lors le dégrèvement d’impôt sur les sociétés, et par conséquent, les intérêts moratoires y afférents, ne seront pas imposables).

 

La Cour d’appel a donc commis une erreur de droit en jugeant que les intérêts moratoires ne pouvaient donner lieu à taxation au motif qu’à la différence des impositions auxquelles ils se rapportent, ils n’avaient pas fait l’objet d’une déduction préalable des résultats.

 

[1] BOI-CTX-DG-20-50-30-20130812 n°310

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