Source : Cass. Com. 18/09/2012 pourvoi n°11-21.744 n°887 P+B
Cet Arrêt a été attendu par la doctrine, qui était unanime sur le fonctionnement du mécanisme ici soumis à l’appréciation de la Cour de Cassation.
La question posée était celle des conséquences de l’existence d’un contrat publié, en matière d’exercice de l’action en restitution du matériel objet du contrat.
Deux conséquences sont ainsi tirées :
– Le titulaire du contrat publié est dispensé d’avoir à engager une action en revendication ;
– L’action en restitution n’a pour lui valeur que de simple faculté, qu’il peut exercer sans être enfermé dans un quelconque délai.
En l’espèce, une coopérative vinicole a fait l’objet d’un redressement puis d’une liquidation judiciaires. Les adhérents de la coopérative introduisaient alors des actions en revendication des stocks présents dans les caves de la coopérative.
Si le Juge Commissaire rejetait ces actions, un Arrêt venait juger que ces adhérents étaient restés propriétaires des stocks de vin, chacun au prorata de ses apports respectifs, dans le cadre d’un contrat publié.
Une expertise était ordonnée pour déterminer les droits de chacun des adhérents, et le liquidateur était condamné, sur la base de cette expertise, à payer au propriétaire revendiquant les sommes calculées.
L’Arrêt commenté résulte de l’examen de la responsabilité du mandataire liquidateur dans la répartition du prix des stocks, les adhérents soutenant que celui-ci avait commis une faute.
Cette procédure permet à la Cour de poser les deux jalons de la procédure de restitution :
1. Sur la dispense de revendication
Sans surprise, la Cour de Cassation confirme que le titulaire d’un contrat publié n’a pas à introduire d’action en revendication.
Ce principe est l’application pure et simple de l’article L621-116 (ancien) qui disposait :
« Le propriétaire d’un bien est dispensé de faire reconnaître son droit de propriété lorsque le contrat portant sur ce bien a fait l’objet d’une publicité ».
Les juges du fond avaient en effet considéré que cet article visait essentiellement les contrats de crédit bail faisant l’objet d’une publication spécifique.
La loi ne distinguant pas les cas, la Cour de Cassation a rétabli sa juste portée au texte, portée strictement transposable sous l’empire des nouveaux textes de la loi de sauvegarde (article L624-10 nouveau).
2. Sur l’action en restitution
Examinant un deuxième moyen, la Cour de Cassation valide l’analyse selon laquelle l’exercice de l’action en restitution n’est qu’une simple faculté ouverte au créancier titulaire d’un contrat publié, lequel n’est, en outre, enfermé dans aucun délai pour l’exercice de celle-ci.
La doctrine était, de longue date, parvenue à cette conclusion, comparant la rédaction de l’article relatif à l’action en restitution avec celle de l’action en revendication, laquelle précisait un délai.
L’analyse était en outre confortée par l’examen des travaux préparatoires de l’assemblée nationale à l’occasion de la réforme de la loi de sauvegarde des entreprises.
L’Ordonnance du 18 décembre 2008 est venue rajouter un nouvel article L624-10-1 dans le code de commerce, prévoyant que lorsque le droit à restitution a été reconnu dans les conditions prévues à l’article L624-10, et si le bien fait l’objet d’un contrat en cours au jour de l’ouverture de la procédure, la restitution effective n’interviendra qu’au jour de la résiliation du contrat ou au terme de celui-ci.
Ainsi, l’Arrêt commenté vient ici poser la pierre manquante à l’édifice de l’action en restitution, qui s’articule désormais comme suit :
– Le créancier titulaire du contrat publié n’a pas à exercer la revendication ;
– Il exerce, dans les délais qu’il souhaite, son action en restitution ;
– La reprise du bien par le créancier, selon les dispositions de l’article L624-10-1 du Code de Commerce, malgré le succès de l’action en restitution, n’interviendra en revanche que lorsque le lien contractuel aura cessé.
L’ensemble de la procédure est donc aujourd’hui connu.
Etienne CHARBONNEL
Vivaldi-Avocats