L’assureur dommages-ouvrage engage sa responsabilité contractuelle lorsqu’il est démontré que les travaux qu’il a préfinancés n’ont pas permis de mettre fin au désordre.
Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 14 décembre 2022, 21-19.544
I –
Une police dommages-ouvrage est souscrite dans le cadre d’un chantier de construction d’une clinique.
Après réception, des désordres surviennent.
Une déclaration de sinistre est régularisée auprès de l’assureur dommages-ouvrage qui accepte d’indemniser.
Les travaux de reprises sont donc réalisés mais les désordres réapparaissent de sorte que plusieurs autres déclarations de sinistre sont adressées à l’assureur dommages-ouvrage.
Celui-ci refuse de mobiliser ses garanties, au motif que les désordres déclarés ne seraient pas de nature décennale.
L’assureur dommages-ouvrage a dès lors été assigné, après expertise judiciaire, sur le fondement de l’ancien article 1147 du Code civil, devenu article 1231-1 du même code.
Il lui était reproché un manquement à son obligation de résultat de préfinancer les travaux propres à remédier efficacement aux désordres garantis.
II –
En cause d’appel, la clinique est déboutée de ses demandes aux fins de garantie, la Cour d’appel ayant considéré que l’assureur dommages-ouvrage n’avait pas commis de faute au sens des dispositions de l’ancien article 1147 du Code civil.
La Cour d’Appel a en effet relevé que l’assureur dommages-ouvrage avait respecté la procédure, s’était conformé aux préconisations de l’expert, avait financé les travaux prescrits, puis avait coopéré aux opérations d’expertise judiciaire et que l’insuffisance des mesures de réparation résultait de la complexité du système de sécurité incendie, de la multiplicité des acteurs intervenus dans l’installation, sa maintenance et son contrôle, dans la difficulté technique pour les experts à définir la meilleure solution de réparation, ainsi que dans la difficulté du maître de l’ouvrage lui-même à définir précisément la nature et l’ampleur des désordres.
La clinique a formé un pourvoi en cassation.
III –
L’arrêt est cassé pour les motifs suivants :
« Vu l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :
Aux termes de ce texte, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part.
Il est jugé que l’assureur dommages-ouvrage manque à ses obligations contractuelles en ne préfinançant pas une réparation efficace et pérenne de nature à mettre fin aux désordres (3e Civ., 11 février 2009, pourvoi n° 07-1.761, Bull. 2009, III, n°33).
Pour rejeter la demande d’indemnisation formée par la clinique sur le fondement de l’article 1147 du code civil, l’arrêt retient que l’assureur dommages-ouvrage a respecté la procédure, s’est conformé aux préconisations de l’expert, a financé les travaux prescrits, puis a coopéré aux opérations d’expertise judiciaire et que l’insuffisance des mesures de réparation résultait de la complexité du système de sécurité incendie, de la multiplicité des acteurs intervenus dans l’installation, sa maintenance et son contrôle, dans la difficulté technique pour les experts à définir la meilleure solution de réparation, ainsi que dans la difficulté du maître de l’ouvrage lui-même à définir précisément la nature et l’ampleur des désordres.
En statuant ainsi, alors qu’elle avait constaté que les travaux financés par l’assureur dommages-ouvrage à la suite des deux premières déclarations de sinistres n’avaient pas permis de mettre fin aux désordres, la cour d’appel a violé le texte susvisé ».
IV –
La Cour rappelle que l’assureur dommages-ouvrage a l’obligation de préfinancer des travaux efficaces et pérennes de nature à mettre fin aux désordres.
Il s’agit d’une jurisprudence constante.
La Cour rappelle également qu’il s’agit d’une obligation de résultat et non de moyen de sorte qu’à partir du moment où le résultat n’est pas atteint, l’assureur engage sa responsabilité, peu importe les moyens mis en œuvre pour tenter de parvenir au résultat, en vain.