La prise d’acte est-elle conditionnée à la mise en demeure préalable de l’employeur ?

Thomas T’JAMPENS
Thomas T’JAMPENS

SOURCE : Cour de cassation – Chambre sociale 3 avril 2019, Demande d’avis n°19-70.001, F-P-B-RI

 

Un salarié en contrat à durée déterminée a pris acte de la rupture de son contrat de travail.

 

Il saisit, le Conseil de Prud’hommes de NANTES aux fins de voir sa prise acte produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

 

L’employeur faisait quant à lui, valoir que la prise d’acte devait produire les effets d’une démission.

 

En prenant acte de la rupture de son contrat de travail, le salarié impute à l’employeur la charge de cette rupture, en motivant le plus souvent son acte par le non-respect des obligations contractuelles.

 

Dans une telle hypothèse, lorsque la gravité des manquements est constatée, les juges font produire à la prise d’acte les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse[1]. Dans le cas contraire, elle produit les effets d’une démission.

 

La jurisprudence a toutefois considéré que ce mode de rupture ne pouvait bénéficier qu’aux seuls salariés en Contrat à Durée Indéterminée.  En présence d’un Contrat à Durée Déterminée, lorsqu’un salarié rompt le contrat de travail et qu’il invoque des manquements de l’employeur, il incombe au juge de vérifier si les faits invoqués sont ou non constitutifs d’une faute grave [2].

 

L’employeur au cours des débats faisait valoir, qu’en application des dispositions de l’article 1226 du Code civil, imposant notamment préalablement à toute résolution unilatérale du contrat et sauf urgence, de mettre en demeure le débiteur défaillant de satisfaire à son engagement.

 

Qu’en l’absence de mise en demeure préalable de la part du salarié, la résolution du contrat de travail ne peut intervenir.

 

Face à cette argumentation, le Conseil de Prud’hommes de Nancy sollicite l’avis de la juridiction suprême, afin d’obtenir un éclairage sur cette question de droit nouvelle :

 

–     L’article 1226 du Code civil est-il applicable au salarié qui prend acte de la rupture de son contrat de travail ?

 

–     Dans l’affirmative, quelles sont les conséquences juridiques attachées à la prise d’acte prononcées sans que cette exigence ait été respectée ?

 

La chambre sociale rappelle qu’en l’article 1105 du code civil, les contrats, qu’ils aient ou non une dénomination propre, sont soumis à des règles générales, insérées dans le Code civil. Ces règles générales s’appliquent sous réserve de ces règles particulières propres à chacun d’eux.

 

Dès lors, bien qu’il résulte de la combinaison des articles 1224, 1225 et 1226 du Code civil, instaurant la possibilité de résolution du contrat, la Chambre sociale de la Cour de Cassation, constate que les modes de rupture du contrat de travail, à l’initiative de l’employeur ou du salarié, sont régis par des règles particulières, et emportent des conséquences spécifiques, de sorte que les dispositions de l’article 1226 du code civil ne leur sont pas applicables.

 

Le salarié, indépendamment de la forme de son contrat peut prendre acte de la rupture de son contrat de travail sans préalablement mettre en demeure l’employeur de satisfaire à ses obligations.

 

[1] Cass. soc., 26 mars 2014, n° 12-23.634

 

[2] Cass. Soc. 30 mai 2007 n° 06-41.240

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