L’assignation en paiement radiée du rôle ne se voit pas bénéficier de l’interruption de la péremption.

Jacques-Eric MARTINOT
Jacques-Eric MARTINOT - Avocat

 

 

SOURCE : Cass.Civ.2ème, 24 septembre 2015, n°14-20.299, n°1361 P+B

 

La procédure civile est une matière protectrice des parties qui encadre le procès dans le respect du contradictoire et de la loyauté.

 

Il en découle que les échanges et actes accomplis durant la procédure doivent l’être de bonne foi. Ces derniers sont encadrés dans le temps afin d’éviter toute manœuvre dilatoire.

 

Ainsi, l’article 386 du Code de Procédure civile[1] énonce le principe de la péremption d’instance. La péremption se conçoit par l’absence de diligence par les parties pendant une période de deux ans.

 

Classiquement, la Cour considère que les actes interrompant la péremption d’instance doivent émaner des parties elles-mêmes par la voie de leur Conseil. En opposition à cette affirmation, un acte émanant du juge par sa propre volonté ne sera pas interruptif d’instance.

 

Or, il est possible de trouver des situations mixtes. La Haute Cour a déjà considéré que la péremption d’instance était suspendue lorsque les parties n’ont plus à accomplir de diligences de nature à faire progresser l’affaire. La suspension est alors acquise entre la date d’audience et la date à laquelle les parties sollicitent le retrait du rôle[2].

 

Par arrêt du 24 septembre 2015, la Haute Cour s’est à nouveau prononcée sur la péremption d’instance confirmant à nouveau la distinction entre les actes émanant des parties et ceux émanant de la juridiction.

 

Assignée devant le Tribunal d’instance en paiement qui a sursis à statuer, la Banque poursuivante a fait réinscrire l’affaire au rôle dudit Tribunal le 15 septembre 2008.

 

Appelée à nouveau le 10 novembre 2008, l’affaire a été radiée du rôle en application de l’article 381 du Code de Procédure civile[3].

 

C’est alors que le 20 septembre 2010 que la Banque a réinscrit l’affaire au rôle mais elle se voit soulevé par le défendeur la péremption d’instance.

 

La Cour d’appel de Bastia a parfaitement suivi le raisonnement de la demanderesse en considérant que l’instance n’était pas périmée au motif que la radiation de l’affaire en novembre 2008 puis réintroduite en septembre 2010 n’avait pas laissé écouler le délai légal de péremption égal à deux ans.

 

La Cour de cassation va casser l’affaire dans toutes ses dispositions et considérer que la radiation prononcée le 10 novembre 2008 n’interrompait pas le délai de péremption et que de ce fait, la péremption était pleinement acquise.

 

Ainsi, la Haute Cour vient confirmer une jurisprudence constante en ce que d’une part les actes émanant de la juridiction ne sont pas interruptifs d’instance mais d’autre part que la radiation n’est pas un acte interruptif d’instance.

 

Il faut différencier la radiation avec le sursis à statuer qui lui est un acte interruptif du délai de péremption[4].

 

De plus, il faut ajouter qu’en cas de dépendance directe et nécessaire entre deux instances, les diligences accomplies par une partie dans une instance interrompent la péremption de l’autre instance[5].

 

Jacques Eric MARTINOT

Vivaldi-Avocats

 


[1] Article 386 du Code de Procédure Civile : « L’instance est périmée lorsque aucune des parties n’accomplit de diligences pendant deux ans. »

[2]Cass.Civ.2ème, 15 mai 2014, n° 13-17.294 F-P+B

[3] Article 381 du Code de Procédure Civile : « La radiation sanctionne dans les conditions de la loi le défaut de diligence des parties.

Elle emporte suppression de l’affaire du rang des affaires en cours.

Elle est notifiée par lettre simple aux parties ainsi qu’à leurs représentants. Cette notification précise le défaut de diligence sanctionné. »

[4] Cass.Civ.2ème 6 juin 2013, n°12-20964

[5] Cass.Civ 2ème11 juillet 2013 n° 12-15994

 

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