SOURCE : Arrêt du Conseil d’Etat, 1ère et 4ème Chambre réunies du 24 juillet 2019, n° 426527.
C’est un cas relativement classique et fréquent qui a été soumis à l’avis du Conseil d’Etat : en présence d’un indu de prestations sociales notifiées à un assuré, et nonobstant l’existence d’un recours contre la décision de notification de l’indu, l’organisme chargé de reverser les prestations sociales, malgré le caractère suspensif du recours de l’assuré, commence immédiatement à recouvrer les sommes prétendument indues par prélèvement sur les montants à échoir des prestations sociales.
En l’espèce, à la suite d’un contrôle de sa situation, la Caisse d’Allocations Familiales de la VIENNE a décidé le 05 avril 2018 de récupérer, à l’encontre d’une assurée, un indu de prestations d’un montant de 24 229,27 € au titre de l’aide personnalisée au logement, de la prime d’activité, du revenu de solidarité active et de l’aide exceptionnelle de fin d’année que celle-ci avait perçu au cours de la période du 1er mars 2015 au 31 janvier 2018.
Dans le même temps, la Caisse l’informait de ce que la somme de 393,76 serait désormais retenue chaque mois sur les prestations sociales dont elle bénéficiait afin d’assurer le remboursement de cet indu.
L’assurée a contesté cette décision par un recours administratif que la Caisse d’Allocations Familiales et le département de la VIENNE ont, chacun pour les prestations les concernant, rejeté, de sorte que l’assurée a saisi le Tribunal Administratif d’une requête tendant à l’annulation des décisions rejetant ces recours.
L’assurée a ensuite saisi les Juges des Référés sur le fondement de l’article L.521-3 du Code de Justice Administrative d’une demande tendant à la suspension des retenues effectuées sur ses prestations sociales et au remboursement des sommes ayant déjà fait l’objet d’une retenue.
Par une Ordonnance du 07 décembre 2018, le Juge des Référés a enjoint la Caisse d’Allocations Familiales et le département de la VIENNE à restituer à l’assurée les sommes irrégulièrement retenues sur les prestations sociales dans l’attente de l’examen au fond de son recours administratif.
Ensuite de cette Ordonnance, la Caisse d’Allocations Familiales et le département de la VIENNE ont formé un pourvoi en Cassation, afin d’obtenir l’annulation de cette Ordonnance.
Toutefois, le Conseil d’Etat, par un Arrêt du 24 juillet 2019, va considérer que la Caisse d’Allocations Familiales et le département de la VIENNE ne sont pas fondés à demander l’annulation de l’Ordonnance qu’ils attaquent, considérant :
que lorsque la Loi attache un caractère suspensif à l’exercice d’un recours administratif contentieux, l’exécution de la décision qui a fait l’objet de ce recours ne peut plus être poursuivie jusqu’à ce qu’elle ait statué sur ce recours, et
que si malgré cela, l’administration poursuit l’exécution de la décision en dépit du recours, le Juge des Référés peut alors, sur le fondement de l’article L.521-3 du Code de Justice Administrative, prescrire à l’administration, toute mesure justifiée par l’urgence propre à faire cesser la méconnaissance du caractère suspensif du recours, mais aussi enjoindre le reversement des sommes qui sont été retenues à tort en méconnaissance du caractère suspensif du recours, en particulier lorsqu’un organisme chargé du versement de prestations sociales poursuit le recouvrement d’un indu par retenue sur les montants à échoir de ces prestations.
Par suite, le Conseil d’Etat rejette le pourvoi de la Caisse d’Allocations Familiales et du département de la VIENNE.