La Directive du 8 juin 2016 a été initiée sur le constat que les secrets d’affaires sont l’une des formes de protection de la création intellectuelle et des savoir-faire innovants les plus couramment utilisés par les entreprises, et, en même temps, ils sont les moins protégés par le cadre juridique existant de l’Union contre l’obtention, l’utilisation ou la divulgation par d’autres parties.
Or, les entreprises, quelle que soit leur taille, accordent au moins autant de valeur aux secrets d’affaires qu’aux brevets et aux autres formes de droits de propriété intellectuelle. Elles utilisent la confidentialité comme un outil de compétitivité et de gestion de l’innovation dans la recherche, en ce qui concerne une large gamme d’informations, qui va des connaissances technologiques, aux données commerciales telles que les informations relatives aux clients et aux fournisseurs, les plans d’affaires et les études et stratégies de marché.
Il apparaissait donc indispensable d’harmoniser les législations des Etats membres concernant la protection des secrets d’affaires, à commencer par l’établissement d’une définition commune de cette notion.
Ainsi, l’article 2 dispose que : « on entend par « secret d’affaires », des informations qui répondent à toutes les conditions suivantes :
a) elles sont secrètes en ce sens que, dans leur globalité ou dans la configuration et l’assemblage exacts de leurs éléments, elles ne sont pas généralement connues des personnes appartenant aux milieux qui s’occupent normalement du genre d’informations en question, ou ne leur sont pas aisément accessibles,
b) elles ont une valeur commerciale parce qu’elles sont secrètes,
c) elles ont fait l’objet, de la part de la personne qui en a le contrôle de façon licite, de dispositions raisonnables, compte tenu des circonstances, destinées à les garder secrètes ».
L’article 4 liste les actes considérés comme une obtention, une utilisation ou une divulgation illicite de secrets d’affaires, comme suit :
« 2. L’obtention d’un secret d’affaires sans le consentement du détenteur du secret d’affaires et considérée comme illicite lorsqu’elle est réalisée par le biais :
a) d’un accès non autorisé à tout document, objet, matériau, substance ou fichier électronique ou d’une appropriation ou copie non autorisée de ces éléments, que le détenteur du secret d’affaires contrôle de façon licite et qui contiennent ledit secret d’affaires ou dont ledit secret d’affaires peut être déduit ;
b) de tout autre comportement qui, eu égard aux circonstances, est considéré comme contraire aux usages honnêtes en matière commerciale.
3. L’utilisation ou la divulgation d’un secret d’affaires est considérée comme illicite lorsqu’elle est réalisée, sans le consentement du détenteur du secret d’affaires, par une personne dont il est constaté qu’elle répond à l’une ou l’autre des conditions suivantes :
a) elle a obtenu le secret d’affaires de façon illicite ;
b) elle agit en violation d’un accord de confidentialité ou de toute autre obligation de ne pas divulguer le secret d’affaires ;
c) elle agit en violation d’une obligation contractuelle ou de toute autre obligation de limiter l’utilisation du secret d’affaires.
4. L’obtention, l’utilisation ou la divulgation d’un secret d’affaires est aussi considérée comme illicite lorsque, au moment de l’obtention, de l’utilisation ou de la divulgation du secret d’affaires, une personne savait ou, eu égard aux circonstances, aurait dû savoir que ledit secret d’affaires avait été obtenu directement ou indirectement d’une autre personne qui l’utilisait ou le divulguait de façon illicite au sens du paragraphe 3.
5. La production, l’offre ou la mise sur le marché, ou l’importation, l’exportation ou le stockage à ces fins des biens en infraction sont aussi considérés comme une utilisation illicite d’un secret d’affaires lorsque la personne qui exerce ces activités savait ou, eu égard aux circonstances, aurait dû savoir que le secret d’affaires était utilisé de façon illicite au sens du paragraphe 3 ».
L’article 10 instaure des mesures provisoires et conservatoires pouvant être ordonnée par les autorités judiciaires des Etats membres à la demande du détenteur de secrets d’affaires, et notamment la cessation ou, selon le cas, l’interdiction de l’utilisation ou de la divulgation du secret d’affaires à titre provisoire, la saisie ou la remise des biens soupçonnés d’être en infraction, l’interdiction de produire, d’offrir, de mettre sur le marché ou d’utiliser des biens en infraction ou d’importer, d’exporter ou de stocker des biens en infraction à ces fins.
L’article 14 précise quel mode de calcul doit être adopté pour réparer le préjudice subi par le détenteur de secrets d’affaires du fait de l’obtention, de l’utilisation ou de la divulgation illicite du secret d’affaires, lequel ressemble sensiblement à celui prévu en matière de contrefaçon, comme suit :
« Lorsqu’elles fixent le montant des dommages et intérêts visés au paragraphe 1, les autorités judiciaires compétentes prennent en considération tous les facteurs appropriés tels que les conséquences économiques négatives, y compris le manque à gagner, subies par la partie lésée, les bénéfices injustement réalisés par le contrevenant et, dans les cas appropriés, les éléments autres que les facteurs économiques, tel que le préjudice moral causé au détenteur de secrets d’affaires du fait de l’obtention, de l’utilisation ou de la divulgation illicite du secret d’affaires.
Alternativement, les autorités judiciaires compétentes peuvent, dans les cas appropriés, fixer un montant forfaitaire de dommages et intérêts, sur la base d’éléments tels que, au moins, le montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrevenant avait demandé l’autorisation d’utiliser le secret d’affaires en question ».
Selon l’article 19, les Etats membres doivent mettre leur législation en conformité avec la directive au plus tard le 9 juin 2018.
Virginie PERDRIEUX
Vivaldi-Avocats