Exonération de la plus-value immobilière sur la résidence principale : à l’épreuve du faisceau d’indices

Coralie MOREAU
Coralie MOREAU - Avocat

En cas de cession de la résidence principale, l’exonération de la plus-value est de pur fait. Celle-ci peut être remise en cause par l’administration fiscale avec la méthode du faisceau d’indices si les éléments démontrent que le bien ne pouvait pas constituer la résidence habituelle et effective du contribuable.

Tribunal administratif de Paris, 28 juin 2023, n° 2109840

Pour rappel, l’article 150-U-II-1° du Code général des impôts prévoit que les plus-values réalisées à l’occasion de la cession de la résidence principale du cédant sont exonérées.

Les résidences principales s’entendent des immeubles ou parties d’immeubles constituant la résidence habituelle et effective du propriétaire, c’est-à-dire celle que le propriétaire occupe la majorité de l’année.

Afin de bénéficier de l’exonération, le logement doit être la résidence du cédant au jour de la cession.

L’exonération de la plus-value des résidences principales est ainsi valable sans condition. Elle s’applique systématiquement sur déclaration du propriétaire.

Toutefois, en cas de contrôle, l’administration fiscale peut être amenée à remettre en cause l’exonération. Le contribuable devra ainsi apporter tous les éléments permettant de justifier que le bien cédé constituait au moment de la vente sa résidence habituelle et effective.

En l’espèce, un couple de contribuable a acquis en juin 2018 un appartement à Paris pour un montant de 590 000 €, bien qu’ils ont vendu en septembre 2019 pour un prix de 820 000 €. Cette cession a été exonérée de plus-value dès lors qu’ils ont indiqué que ce bien constituait leur résidence principale.

Suite à un contrôle, l’administration fiscale a remis en cause l’exonération et a taxé la plus-value réalisée. Les contribuables ont contesté en déposant une réclamation contentieuse qui a été rejetée par l’administration fiscale.

Ils ont ainsi saisi le tribunal administratif en justifiant du caractère habituel et effectif du bien vendu par les éléments suivants :

  • Réception de courriers administratifs à cette adresse (relevés bancaires, MSA) ;
  • Factures d’électricité et de gaz sur 2018 et 2019 ;
  • Attestation d’assurance d’habitation principale ;
  • Absences justifiées de juin 2018 à juin 2019 afin de suivre des travaux de rénovation d’un bien immobilier situé sur la commune de Bozouls et acquis pour en faire un gîte.

Le tribunal administratif, faisant application de la méthode du faisceau d’indices, retient les éléments suivants :

  • Le bien n’a jamais été déclaré comme adresse principale sur la déclaration de revenu ;
  • Les contribuables n’ont pas été assujettis à la taxe d’habitation sur ce bien ;
  • Le bien immobilier situé à Bozouls a été déclaré comme adresse d’envoi auprès de l’administration fiscale depuis novembre 2018 ;
  • Les factures d’électricité et de gaz font état d’une consommation faible ne correspondant pas à une occupation régulière ;
  • A l’exception de la MSA, les autres organismes adressaient également le courrier à Bozouls ;
  • Les comptes bancaires étaient ouverts à différentes adresses (ancienne adresse, Bozouls et Paris) ;
  • Les photos apportées par les contribuables pour justifier de l’impossibilité d’occuper le bien de Bozouls en tant que résidence principale compte tenu des travaux en cours ne suffissent pas dès lors que les locaux sont vastes et qu’une partie pourrait être habitable.

Le tribunal rejette ainsi la demande des contribuables en retenant que la cession ne pouvait pas bénéficier de l’exonération de résidence principale dès lors que les contribuables n’apportaient pas d’éléments suffisants visant à soutenir que le bien était leur résidence principale.

Le tribunal administratif vient ainsi rappeler que même si l’exonération de plus-value immobilière de la résidence principale se fait sur simple déclaration du contribuable, l’administration fiscale peut la remettre en cause en appliquant la méthode du faisceau d’indices, charge ensuite au contribuable d’apporter la preuve contraire.

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