Afin de « concourir au développement d’entreprises spécialisées dans le traitement des sites et sols pollués et à l’essor d’une filière économique intégrée »[1], trois amendements au projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (Alur) avaient été déposés sous l’article 84 bis et adoptés, pour permettre à des « tiers » de se substituer au dernier exploitant d’ICPE connu, ou au propriétaire du site le cas échéant, dans ses relations avec l’Administration, en vu de la dépollution du sol.
La réforme visait à officialiser une pratique non reconnue par l’Administration, tendant à faire procéder par un « tiers intéressé » à la remise en état du site par contrat de droit privé.
L’article 173 de la Loi ALUR modifiait ainsi, dès son entrée en vigueur, l’article L512-21 du Code de l’environnement, en permettant qu’un tiers puisse demander au représentant de l’Etat dans le département de se substituer à l’exploitant d’une ICPE afin de la réhabiliter en cas d’arrêt définitif de l’installation. La mise en œuvre de ces « démarches » attendaient toutefois un décret en Conseil d’Etat.
Le décret n° 2015-1004 du 18 août 2015 a été publié à cette fin insérant les articles R. 512-76 à R512-81 au Code de l’environnement.
Le texte prévoit une procédure en deux étapes :
Le tiers demandeur » tel qu’il est désigné par la loi et le décret, adresse au préfet un « accord préalable » (article R512-76) contenant notamment l’accord de l’exploitant, le cas échéant celui du propriétaire du site, du maire ou du président de l’établissement public de coopération intercommunale, et le type d’usage futur du site envisagé, qui sera apprécié par le préfet ;
A réception de la notification du préfet déterminant le ou les types d’usage futur du site, le tiers demandeur remet en deux exemplaires un dossier complet (R512-78), comprenant notamment l’estimation du montant et la durée des travaux et un document présentant ses capacités techniques et financières.
Au vu des documents ainsi transmis, le préfet statue sur la substitution et définit par arrêté les travaux à réaliser, le délai dans lequel ils devront être accomplis, le montant et la durée des garanties financières qui devront être prises par le tiers. Ces garanties financières, dont le montant est « celui des travaux de réhabilitation prévus » doivent être justifiées par attestation dans un certain délai défini par le Préfet.
Le décret prévoit également l’hypothèse dans laquelle l’ICPE n’a plus d’exploitant connu : Un tiers peut alors se manifester directement auprès du préfet, sans disposer de l’accord du dernier exploitant. L’accord du propriétaire, du maire ou du président de l’établissement public de coopération intercommunale sera naturellement requis.
L’article R512-80 définit les garanties financières exigées : Il peut s’agir :
D’une garantie à première demande d’un établissement bancaire ou financier ;
D’une consignation ;
D’une garantie à première demande d’une société contrôlant le tiers demandeur au sens de l’article L233-3 du Code de commerce, cette société devant elle-même bénéficier d’une GAP d’un établissement bancaire ou financier ou procéder à une consignation;
Les garanties seront mises en œuvre en cas :
D’inexécution des opérations de dépollution ;
De liquidation judiciaire du tiers demandeur ;
Disparition du tiers demandeur
Enfin, le décret précise que le dernier exploitant, malgré cette substitution, n’est pas dégagé de toute responsabilité : En cas de mise en œuvre des garanties, si celles-ci ne permettent finalement pas d’achever la réhabilitation du site, le dernier exploitant sera tenu de remettre le site en état (art R512-81).
Sylvain VERBRUGGHE
Vivaldi-Avocats
[1] Amendement des 27, 28 et 29 janvier 2014,