Déchéance des intérêts faute d’information de la caution jusqu’à extinction de la dette

Jacques-Eric MARTINOT

Source : Cass.Civ.2., 30 avril 2025, n°22-22033, n°401 B

Le prêteur doit continuer à envoyer les informations annuelles à la caution jusqu’à ce que la dette soit entièrement remboursée, même après un premier retard de paiement et un rappel. Si le prêteur ne le fait pas, il risque de perdre les intérêts.

Si la solution ne surprend guère, l’arrêt ci-dessous rapporté a néanmoins le mérite de préciser l’étendue de l’obligation d’information annuelle qui pèse sur le créancier professionnel à l’égard de la caution. On sait, en effet, que l’article 2302 du code civil fait obligation au créancier professionnel, notamment aux établissements de crédit ayant accordé un concours financier à une personne physique ou une entreprise sous la condition d’un cautionnement, de faire connaître au plus tard le 31 mars de chaque année à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant dus au 31 décembre de l’année précédente. 

La Cour de cassation souligne ici, à juste titre, que cette obligation d’information perdure jusqu’à l’extinction de la dette garantie.

Par ordonnance en date du 22 septembre 2009, un tribunal de l’exécution d’Alsace-Moselle ordonne la vente forcée d’un immeuble appartenant à deux cautions d’un prêt souscrit auprès d’une banque. Par requête du 26 janvier 2021, les cautions demandent au tribunal judiciaire de constater la prescription de la procédure et de prononcer la déchéance du droit aux intérêts, pénalités et frais pour manquement de la banque à son obligation d’information annuelle.

Le tribunal puis la cour d’appel rejettent leur demande pour la période postérieure au 6 août 2009, date de délivrance du commandement de payer.

Les deux cautions forment un pourvoi en cassation, contestant la limitation de la déchéance aux seuls intérêts échus avant le commandement de payer.

La Cour de cassation accueille favorablement leur pourvoi et censure l’arrêt de la cour d’appel. 

Elle rappelle, à ce titre, que l’obligation d’information annuelle de la caution subsiste tant que la dette garantie n’est pas intégralement éteinte, pour en déduire que cette obligation se poursuit sans interruption, y compris après le premier incident de paiement. En ne recherchant pas la date de la nouvelle information postérieure au commandement de payer, la cour d’appel a privé sa décision de base légale.

En exigeant une recherche précise de la date de chaque notification, la Cour de cassation renforce la sécurité juridique des cautions tout en rappelant au prêteur son devoir de rigueur documentaire. Les banques doivent documenter chaque information annuelle pour éviter la déchéance des accessoires de la dette.

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