Source : Cass. soc., 18 mai 2022, n° 21-11.737
Le contentieux des élections professionnelles est particulièrement abondant ; en l’espèce, il s’agissait pour la Cour de Cassation de se prononcer sur la validité du recours d’un syndicat qui conteste les élections après le déroulement de celles-ci, sans avoir préalablement émis de réserves.
Plusieurs entreprises constituent une UES en vertu d’un accord collectif.
Deux autres accords, l’un concernant le vote électronique, l’autre la fixation et le nombre de collèges électoraux sont convenus.
Les négociations en vue de la signature d’un protocole d’accord préélectoral échouent, la DIRECCTE est saisie de la répartition du personnel entre les collèges pour le CSE de deux des sociétés .
L’employeur fixe les modalités d’organisation des élections et choisit un bureau de vote unique.
Un syndicat considère que des irrégularités ont été commises et assigne les autres syndicats ainsi que les membres titulaires et suppléants élus du CSE aux fins d’obtenir l’annulation des élections.
Le Tribunal Judiciaire, compétent en matière de contentieux électoral, le déboute de sa demande ; il juge que la présentation par le syndicat de sa liste, sans présenter de réserves sur les conditions de déroulement du scrutin vaut acceptation de ses conditions.
Le syndicat soutient à l’appui de son pourvoi que l’absence de réserves émises par un syndicat lors du dépôt d’une liste électorale ne vaut pas acquiescement aux modalités d’organisation des élections fixées unilatéralement par l’employeur.
Il conclut à la violation des articles L. 2314-28, R. 2314-24 et R. 2314-2 du code du travail.
La Cour de Cassation approuve la décision du Tribunal Judiciaire.
La Haute Cour rappelle qu’il résulte des termes de l’article L 2314-28 du code du travail, qu’à défaut d’accord préélectoral signé avec les organisations syndicales et répondant aux conditions de double majorité, il appartient à l’employeur, en l’absence de saisine du tribunal judiciaire, de fixer les modalités d’organisation et de déroulement des opérations de vote
Elle considère qu’« en l’absence de saisine préalable du juge judiciaire en contestation de la décision unilatérale de l’employeur fixant les modalités d’organisation des élections professionnelles, et de réserves sur les modalités d’organisation et de déroulement des opérations de vote ainsi fixées, un syndicat ne peut après proclamation des résultats des élections professionnelles, contester la validité de la décision unilatérale de l’employeur fixant les modalités d’organisation des élections et demander à ce titre l’annulation des élections ».
La Cour de cassation a jugé à maintes reprises que lorsqu’un syndicat a signé le protocole ou lorsqu’il a présenté des candidats sans émettre de réserves sur le protocole, celui-ci ne peut plus en contester la validité et demander l’annulation des élections après les élections.[1]
Et ce en présence d’un protocole d’accord préélectoral répondant aux conditions de double majorité, quand bien même il invoquerait une méconnaissance des règles d’ordre public.[2]
La contestation du protocole préélectoral fondée sur un manquement à l’obligation de négociation loyale doit être introduite judiciairement avant le premier tour des élections ou postérieurement par un syndicat n’ayant pas signé le protocole et ayant émis des réserves expresses avant de présenter des candidats[3].
Ici aucun protocole n’a été signé, ce qui permet à l’employeur à défaut de saisine du Tribunal judiciaire, de fixer unilatéralement les modalités des élections.
Le syndicat avait la possibilité de saisir le Tribunal Judiciaire préalablement ou de présenter des réserves au plus tard au moment de déposer sa liste de candidats ; attendre le résultat des élections lui a interdit d’émettre toute contestation ultérieure.
[1] Cass. soc. 15/5/2013 no 12-23.073
[2] Cass.soc 24/11/2021 n°20-20962
[3] Cass.Soc 9/10/2019 n° 19-10780
