Condamnations en série pour Google

Vianney DESSENNE
Vianney DESSENNE - Avocat

Source : Tribunal de commerce de Paris, 8e ch., jugement du 10 février 2021 et une enquête de la DGCCRF du 15 février 2021

 

Dans un jugement du Tribunal de commerce de Paris du 10 février 2020, la société Google Ireland Ltd a été condamnée au paiement de la somme d’un peu plus d’1 million d’euros pour abus de position dominante.

 

En l’occurrence, un opérateur de renseignements téléphoniques avait fait appel aux services « Google Ads » pour promouvoir ses activités.

 

S’ensuivit un litige entre Google et cet opérateur quant à la nature des annonces de ce dernier, aboutissant à ce que l’incontournable moteur de recherches décide de modifier ses conditions générales en vue de ne plus autoriser les annonces pour les services de renseignements téléphoniques et suspende définitivement les annonces de cet opérateur.

 

Faisant ensuite l’objet d’une procédure collective, ce dernier et les organes de la procédure ont assigné Google Ireland Ltd pour pratique anticoncurrentielle à travers ici un abus de position dominante.

 

Le Tribunal de commerce de Paris affirme en premier lieu que Google se trouve bien en position dominante sur le marché de la publicité en ligne liée aux recherches, rappelant au passage une décision en ce sens de l’Autorité de la Concurrence du 19 décembre 2019.

 

Or, aucun motif n’a été donné par Google pour justifier la suspension définitive des annonces de l’opérateur de renseignements téléphoniques, s’appuyant simplement sur de prétendues plaintes  de consommateurs.

 

C’est alors que le Tribunal rappelle que la protection des consommateurs relève de la compétence de l’Autorité de Régulation des Communications Electroniques, des Postes et de la Distribution de Presse (ARCEP) qui assure notamment un contrôle des opérateurs de renseignements téléphoniques.

 

Il constate par ailleurs la concomitance entre la suspension de la mise en ligne des annonces et le développement du propre service de Google aux finalités identiques à celles de l’opérateur lésé, relevant à cet égard que la firme américaine :

 

« a un intérêt évident à éliminer toutes sociétés permettant une mise en contact téléphonique qui deviennent concurrentes à ses propres produits. La mise en place de cette règle doit donc être considérée comme une manœuvre anticoncurrentielle »,

 

Et ajoutant :

 

« Google ne pouvait ignorer qu’en privant de son service de publicité en ligne les sociétés de renseignement téléphonique elle éliminait celles-ci qui n’avaient aucune alternative ».

 

Fort de ce constat, le Tribunal condamne Google a réparé le préjudice substantielle engendré par l’interruption d’activité et la perte de marge qui en découle.

 

Cette condamnation de Google est quasi concomitante à une autre condamnation la concernant prononcée cette fois par la DGCCRF le 15 février 2021, toujours pour un peu plus d’un million d’euros, cette fois pour avoir constitué un classement trompeur des hôtels en France

 

Il était ici reproché à Google de procéder à ce classement en se fondant exclusivement sur les commentaires et avis des consommateurs, ceux-ci notant via l’attribution d’étoiles sur une échelle entre 1 et 5.

 

Selon des hôteliers, ce système d’étoiles entretenait la confusion avec un autre classement réalisé par l’Agence du Développement Touristique en France, dépendante du Ministère en charge du tourisme, basé sur le même principe d’attribution d’étoiles.

 

Ainsi, une plainte avait été déposée auprès de la DGCCRF, laquelle concluait à ce que Google se livrait à une pratique commerciale trompeuse, c’est-à-dire une pratique commerciale qui induit en erreur ou est susceptible d’induire en erreur les personnes auxquelles elle s’adresse et qui, en raison de son caractère trompeur, est susceptible d’affecter leur comportement économique ou qui, pour ces raisons, porte préjudice ou est susceptible de porter préjudice à un concurrent.

 

C’est dans ces conditions que les sociétés Google Ireland Ltd et Google France ont corrigé leurs pratiques et, après accord du procureur de la République de Paris, ont accepté de payer une amende de 1,1 million d’euros dans le cadre d’une transaction pénale.

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