Cautionnement, proportionnalité de l’engagement et régime matrimonial séparatiste

Thomas LAILLER
Thomas LAILLER

 

Source : Cass. com., 24 mai 2018, n°16-23.036

 

I – Les faits

 

Classiquement un établissement de crédit consent un prêt à une société. A la sûreté et garantie dudit prêt, la banque obtient la caution personnelle d’une entreprise tierce. Celle-ci se couvre également par la caution personnelle du dirigeant de la société emprunteuse.

 

Cette dernière défaillant dans le remboursement de l’emprunt, la caution personne morale est appelée à s’exécuter. Subrogée dans les droits de la banque, elle se retourne contre la caution personne physique qui, en défense, oppose la disproportion de son engagement.

 

Les juges du fond condamnent la caution personne physique en paiement, estimant que certes ses revenus sont insuffisants pour exécuter son engagement (deux ans et demi de revenus), mais pris avec les revenu et patrimoine de son conjoint séparé de biens, la disproportion disparaît. Il serait en mesure de contribuer de manière substantielle aux charges de la vie courante du foyer.

 

La Cour de cassation est saisie de la question.

 

II – L’arrêt de cassation

 

La décision est cassée, pour violation de l’article L. 341-4 du Code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 14 mars 2016, ensemble l’article 1536 du Code civil.

 

La Cour de cassation rappelle la méthode d’évaluation de la disproportion d’un cautionnement lorsque les garants sont mariés sous le régime de la séparation de biens : seuls les revenus et patrimoine de la caution séparée de biens doivent être pris en compte.

 

III – Un rappel utile

 

La Haute juridiction avait dû déjà rappelé ce principe en 2015[1].

 

La question du changement de régime matrimonial d’une caution peut alors se poser pour les créanciers. La jurisprudence répond par principe que le seul fait pour un époux de se porter caution n’interdit pas pour autant une modification du régime matrimonial, même si cette modification est contraire aux intérêts des créanciers, dès lors qu’il n’en résulte pas ipso facto la preuve de l’existence d’une fraude à leurs droits.[2] La vigilance des banquiers sur la question est indispensable.

 

Thomas LAILLER

Vivaldi-Avocats


[1] Cass., Civ. 1ère, 25 novembre 2015, n° 14-24.800, Inédit

[2] Cass. Civ. 1ère, 2 mars 1982, voir aussi CA Versailles, 1ère Ch., 17 mars 1994

 

 

 

 

 

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