Source : Cass. Civ. 1ère, 9 janvier 2019, n°17-19.570, F-D
I – Les faits
Un établissement de crédit octroie un prêt à une société, par acte notarié. Une personne physique, gérant et unique associé de cette société, consent à la banque différentes garanties de remboursement. Elle se porte notamment caution solidaire du prêt, et hypothèque un immeuble en garantie du remboursement.
Poursuivie en paiement et en réalisation de l’immeuble, la caution invoque les dispositions protectrices du Code de la consommation, et particulièrement l’inefficacité du cautionnement disproportionné aux biens et revenus de la caution (article L.332-1 du Code de la consommation).
Une cour d’appel refuse d’appliquer ces dispositions en retenant que la caution a consenti une inscription d’hypothèque, distincte de l’engagement de caution souscrit parallèlement.
II – Le pourvoi en cassation
L’arrêt est censuré par la Haute juridiction. L’acte notarié mentionnait, au titre des garanties du prêt, d’une part, un nantissement de compte d’instruments financiers, d’autre part, un « cautionnement personnel solidaire et indivisible […] avec affectation hypothécaire » ; par suite, l’affectation hypothécaire n’était que l’accessoire du cautionnement.
III – Un rappel de la distinction garant réel et caution personnelle
Le cautionnement réel ou hypothécaire est une sûreté réelle consentie pour garantir la dette d’un tiers qui, n’impliquant aucun engagement personnel à satisfaire l’obligation d’autrui, n’est pas véritablement un cautionnement.
Ainsi la caution réelle ne peut pas invoquer les dispositions protégeant la caution, comme l’obligation d’information annuelle due par les organismes de crédit[1], ou le caractère disproportionné du cautionnement[2]. Par ailleurs elle peut être poursuivie sur le bien donné en garantie mais non sur la totalité de son patrimoine[3].
Il en va cependant autrement si le garant a pris en plus de l’affectation hypothécaire un engagement personnel de caution[4], les deux garanties se cumulant[5] .
C’est le sens de la jurisprudence commentée ici.
Ce cumul permet au créancier, en cas de défaillance du débiteur principal, d’obtenir le prix du bien donné en garantie, ainsi que le paiement des sommes restant dues en saisissant, si besoin est, les autres biens de la caution.
Comme le cautionnement ne se présume pas et doit être exprès (article 2292 du Code civil), les parties à l’acte doivent attentives dans le choix des termes utilisés (plus spécialement le notaire). Ainsi, dans un cas où une personne physique s’était portée caution « solidaire et hypothécaire », il a été jugé qu’il ne pouvait pas être déduit du seul emploi du terme « solidaire » l’existence d’un engagement personnel[6].
C’est ce qu’on appelle le poids des mots.
[1] Cass. com. 7 mars 2006, n° 04-13.762, FS-PBRI
[2] Cass. civ 1ère, 7 mai 2008, n°07-11.692, F-PB
[3] Cass.civ.1ère, 25 novembre 2015, n°14-21.332, F-PB
[4] Cass. civ. 1ère, 13 novembre 2002, n°00-12.797 P-B ; Cass. Civ. 1ère, 9 novembre 2004, n°01-17.431 FS-PB
[5] Cass. com. 21 mars 2006, n°05-12.864, P-B
[6] Cass. civ. 1ère, 29 février 2000, n°98-10.902, P-B