Bail commercial, aménagement et mise aux normes de locaux conformément à l’activité du preneur

Alexandre BOULICAUT
Alexandre BOULICAUT - Juriste

Aux termes d’un arrêt en date du 9 janvier 2024, la Cour d’appel de PAU a été amenée à se prononcer sur la charge de travaux de mise aux normes d’un réseau d’évacuation des eaux usées d’une cuisine d’un restaurant, au regard des stipulations contractuelles d’un bail commercial et de l’obligation de délivrance du bailleur.

SOURCE : CA PAU, 9 janvier 2024, n°22/01512

I –

La Cour d’appel de PAU avait à trancher l’obligation de délivrance conforme du bailleur confronté à la revendication d’un preneur, victime d’un réseau des eaux usées non normé, au titre d’un bail commercial à destination initiale de « bar, licence IV ».

Le fonds a été cédé en cours de bail, et le preneur autorisé à exploiter une activité complémentaire de restauration suivant nouveau bail régularisé.

Le Tribunal Judiciaire de BAYONNE, dont le jugement est infirmé pour partie (seul le défaut de conformité est étudié),  avait déclaré le défaut de conformité réglementaire du système d’évacuation des eaux usées du restaurant, imputable au bailleur.

Ce défaut de conformité avait d’ailleurs fait l’objet d’un rapport de visite de l’autorité administrative en cours de bail.

Après avoir relevé que le bail transférait au preneur, par une clause « claire et dénuée d’ambiguïté », la réalisation des travaux d’adaptation du local à l’activité de restauration, autorisée en complément de l’activité de bar cédée [en cours de bail], la Cour juge que les travaux de création du restaurant et de mise aux normes y afférents, incombaient au locataire.

Le fonds ayant été cédé en cours de bail, la Cour en déduit que le locataire-cessionnaire venant aux droits et obligations du locataire sortant, devait répondre de la non-conformité réglementaire du réseau d’évacuation des eaux usées de la cuisine, en application de la loi des parties.

Le jugement est donc infirmé sur ce point.

II –

Etat jurisprudentiel sur les clauses de transfert des obligations normalement à la charge du bailleur :

  • Les travaux à réaliser sur injonction ou prescrits par l’autorité administrative sont à la charge du bailleur, sauf stipulation expresse contraire  (Cass. civ 3ème, 28/01/2021, n°20-13854) ;
  • En l’absence d’une clause dérogatoire, le coût des travaux ordonnés par l’autorité administrative peut être supporté par le preneur, lorsque ceux-ci sont rendus nécessaires en raison de l’adjonction par le preneur d’activités complémentaires à celles contractuellement prévues (Cass. civ 3ème, 13/06/2007, n°06-13661), ou lorsque ces travaux résultent du choix de l’activité du locataire dans le cadre d’un bail « tous commerces » (Cass. civ 3ème, 19/04/1989, n°87-14535) ;
  • La clause de transfert des travaux de mise en conformité des locaux nécessités pour les besoins de l’activité du preneur, décharge le bailleur pourvu que celle-ci soit suffisamment claire et précise (Cass. civ 3ème, 29/06/2022, n°21-14482).

L’arrêt a été rendu sous l’empire de la loi antérieure à la Loi 2014-626 du 18 juin 2014 dite Pinel, qui pour mémoire interdit au bailleur de transférer sur le preneur un certain nombre de charges, dont les grosses réparations de l’article 606 du Code civil, pour tous les baux conclus ou renouvelés à compter du 5 novembre 2014 (article R.145-35 du C.com), lesquels gros travaux s’entendent selon la jurisprudence comme tous ceux qui « intéressent l’immeuble dans sa structure et sa solidité générale » (Cass. civ 3ème, 13/07/2005, n°04-13764).

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