Source : Cass.3ème Civ., 17 novembre 2021, n°20-16.771
C’est ce que précise la 3ème Chambre Civile de la Cour de Cassation dans cette décision, publiée au bulletin, comme suit :
« …
Faits et procédure
2. Selon l’arrêt attaqué (Colmar, 16 janvier 2020), le 27 mars 1999, M. et Mme [R] ont conclu avec la société Géranium, assurée auprès de la société MMA IARD, un contrat de fourniture des matériaux nécessaires à la construction d’une maison à ossature bois.
3. Ils ont confié à M. [O], assuré auprès de la société Axa France IARD (la société Axa), les travaux de montage et de couverture zinguerie.
4. Se plaignant de malfaçons, M. [R] et la Mutuelle d’assurance des instituteurs de France (la MAIF), son assureur de protection juridique, ont assigné M. [O], la société Géranium et son assureur en indemnisation.
Examen des moyens
Sur le premier moyen et le second moyen, pris en sa première branche, du pourvoi principal et le moyen, pris en sa première branche, du pourvoi incident, ci-après annexés
5. En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le second moyen, pris en ses deuxième et quatrième branches, du pourvoi principal et le moyen, pris en ses deuxième et quatrième branches, du pourvoi incident
Enoncé du moyen
6. Par son second moyen, M. [O] fait grief à l’arrêt de rejeter son recours en garantie à l’encontre de la société Axa, alors :
« 2°/ que seules les clauses de la police d’assurance qui ont été acceptées par l’assuré et sont en vigueur au jour de la survenance des faits justifiant le déclenchement de la garantie lui sont opposables ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté, d’une part, que les conditions particulières du 14 mars 2000 n’avaient pas été signées par l’assuré, d’autre part, que les parties s’accordaient sur le fait que celles du 27 avril 2000 n’étaient pas applicables rationae temporis au litige, compte tenu de la date de début des travaux litigieux ; qu’en faisant pourtant application de la clause excluant du champ de la garantie les « travaux ou ouvrages suivants : [?] maisons à ossature en bois », au motif qu’elle figurait dans les conditions particulières du 14 mars 2000 comme dans celles du 27 avril 2000, dont elle n’a pas suffisamment constaté qu’elles étaient opposables à l’assuré, ce qui était contesté, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016.
4°/ que les motifs hypothétiques ou dubitatifs équivalent à un défaut de motifs ; qu’en retenant, pour faire application de la clause excluant de la garantie les « travaux ou ouvrages suivants : [?] maisons à ossature en bois » qu’elle était, « selon toute vraisemblance » (arrêt attaqué, p. 11), stipulée dans la septième page de l’attestation d’assurance dont elle constatait qu’elle n’était pas produite aux débats, la cour d’appel s’est prononcée par motifs hypothétiques en violation de l’article 455 du code de procédure civile. »
7. Par leur moyen, M. [R] et la MAIF font grief à l’arrêt de rejeter leurs demandes à l’encontre de la société Axa, alors :
« 2°/ que seules les clauses de la police d’assurance qui ont été acceptées par l’assuré et sont en vigueur au jour de la survenance des faits justifiant le déclenchement de la garantie lui sont opposables, qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté d’une part, que les conditions particulières du 14 mars 2000 n’avaient pas été signées par l’assuré, d’autre part, que les parties s’accordaient sur le fait que celles du 27 avril 2000 n’étaient pas applicables rationae temporis au litige, compte tenu de la date de début des travaux litigieux ; qu’en faisant pourtant application de la clause excluant du champ de la garantie les « travaux ou ouvrages suivants : [ … ] maisons à ossature en bois », au motif qu’elle figurait dans les conditions particulières du 14 mars 2000 comme dans celles du 27 avril 2000, sans constater que les conditions particulières du 14 mars 2000 avaient été acceptées par M. [O], qui le contestait et ne les avaient pas signées, ce qui excluait leur opposabilité à M. [R] et à la Maif, la cour d’appel a violé l’article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016 ;
4°/ que les motifs hypothétiques ou dubitatifs équivalent à un défaut de motifs ; qu’en retenant, pour faire application de la clause excluant de la garantie les « travaux ou ouvrages suivants : [ … ] maisons à ossature en bois » qu’elle était, « selon toute vraisemblance », stipulée dans la septième page de l’attestation d’assurance dont elle constatait qu’elle n’était pas produite aux débats, la cour d’appel s’est prononcée par motifs hypothétiques en violation de l’article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 1134, alinéa 1er, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, L. 112-3 du code des assurances et 455 du code de procédure civile :
8. Il résulte des deux premiers de ces textes que, si la garantie de l’assureur ne concerne que le secteur d’activité professionnelle déclaré par le constructeur, lorsque l’assureur dénie sa garantie en invoquant une clause des conditions particulières du contrat d’assurance qui exclut de la garantie souscrite l’activité accomplie par le constructeur, il lui incombe de rapporter la preuve que cette clause a été portée à la connaissance de l’assuré et qu’il l’a acceptée.
9. Selon le troisième, tout jugement doit être motivé.
10. Pour rejeter les demandes de M. [O], ainsi que celles de M. [R] et de la MAIF à l’encontre de la société Axa, l’arrêt retient qu’un seul contrat d’assurance « multirisque artisan du bâtiment » a pris effet au 1er janvier 2000, portant le numéro 1261424004, que le contrat du 27 avril 2000, seul signé par M. [O], est un avenant à ce contrat, prenant effet au 26 avril 2000 et le remplaçant, qu’aux termes des conditions particulières de cet avenant comportant sept pages, il est stipulé en page trois que ne relèvent pas des activités garanties les maisons à ossature bois et que le contrat initial du 14 mars 2000 et prenant effet au 1er janvier 2000, non signé par M. [O], comporte, en tout état de cause, en page trois de ses conditions particulières, la même clause de non-couverture de l’activité de travaux concernant des maisons à ossature bois.
11. L’arrêt ajoute que, si l’attestation d’assurance du 13 septembre 2000 ne comporte pas la page, figurant dans les conditions particulières, énumérant les travaux qui ne relèvent pas des activités garanties, elle comprend en réalité sept pages, dont seulement les six premières sont produites, la septième correspondant selon toute vraisemblance à cette énumération.
12. L’arrêt en déduit que M. [O] ne peut se prévaloir de cette attestation pour soutenir que la clause litigieuse lui est inopposable.
13. En se déterminant ainsi, alors que les parties contestaient que le contrat du 27 avril 2000, prenant effet au 26 avril 2000, était applicable ratione temporis, par des motifs, d’une part, impropres à établir que M. [O] avait eu connaissance des conditions particulières du contrat du 14 mars 2000 et les avait acceptées, d’autre part, dubitatifs équivalant à un défaut de motifs, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard des deux premiers textes susvisés et n’a pas satisfait aux exigences du troisième.
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il déboute M. [O] ainsi que M. [R] et la Mutuelle d’assurance des instituteurs de France de leurs demandes à l’encontre de la société Axa France IARD, l’arrêt rendu le 16 janvier 2020, entre les parties, par la cour d’appel de Colmar ;… »