Pas de recours subrogatoire de l’assureur dommages-ouvrage pour des dommages apparents non réservés à la réception

Amandine Roglin
Amandine Roglin

Le désordre apparent, quelle que soit sa gravité, est couvert par la réception sans réserve, de sorte que le maître de l’ouvrage ne dispose d’aucun recours à l’encontre du constructeur, de même que l’assureur DO subrogé dans les droits de son assuré.

Source :Cass. 3e civ., 11 mai 2022, n° 21-15.217, FS-B

I–

Dans le cadre de travaux de transformation et de rénovation, un maître d’ouvrage a souscrit une assurance de dommages-ouvrage.

Après réception des travaux, il a régularisé une déclaration de sinistre auprès de l’assureur dommages-ouvrage en raison d’un déchaussement des fondations de l’ensemble des murs périphériques et de refend.

L’assureur DO a considéré que ses garanties étaient mobilisables et a accepté d’indemniser le maître d’ouvrage.

Il a ensuite exercé un recours subrogatoire à l’encontre du constructeur à l’origine du désordre et de son assureur.

Les juges du fond ont condamné le constructeur et son assureur considérant que le dommage portait effectivement atteinte à la solidité de l’ouvrage.

L’assureur du constructeur a formé un pourvoi en cassation soutenant que ce dommage était apparent à la réception et qu’il ne relevait dès lors pas de la garantie décennale.

II –

La Cour de cassation a censuré les juges du fond.

« En statuant ainsi, alors qu’elle avait retenu, par motifs adoptés, que le désordre apparent avait été couvert par la réception sans réserve, de sorte que le maître de l’ouvrage ne disposait d’aucun recours sur aucun fondement à l’encontre du constructeur, la cour d’appel a violé l’article L. 121-12 du code des assurances et les articles 1251, 3°, et 1252 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ».

III –

L’action subrogatoire de l’assureur DO était voué à l’échec dès lors le dommage n’entrait pas dans le champ d’application de l’article 1792 du code civil.

En effet, le subrogé ne peut avoir plus de droits que le créancier originaire, de sorte que le premier ne recueille que les droits dont le second était titulaire au moment de la subrogation.

En conséquence, le débiteur poursuivi peut opposer au créancier subrogé les mêmes exceptions et moyens de défense que ceux dont il aurait pu disposer initialement contre son créancier originaire.

En l’espèce, la présomption de responsabilité des constructeurs prévue à l’article 1792 du code civil n’ayant pas vocation à jouer en présence d’un désordre, même grave, apparent à la réception, le constructeur et son assureur de responsabilité décennale, pouvaient opposer cette limite à la mobilisation de la garantie décennale et de l’assurance qui y est liée.

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