Source : Arrêt de Chambre sociale de la Cour de cassation du 19 janvier 2022 n° 20-11.962 (F-D, Cassation)
Un salarié engagé à compter du 27 juin 2006 en qualité de journaliste, a été licencié pour motif économique le 15 juillet 2015, après avoir refusé la modification de son contrat de travail incluant une mutation géographique que lui proposait son nouvel employeur suite à la cession de l’entreprise.
Reprochant à son employeur de ne pas avoir établi de plan de sauvegarde de l’emploi, le salarié a saisi la juridiction prud’hommale d’une demande de nullité de son licenciement.
Débouté de l’ensemble de ses demandes par un arrêt de la Cour d’appel de Versailles du 23 octobre 2019 qui va écarter sa demande de nullité du licenciement, considérer celui-ci comme fondé sur une cause réelle et sérieuse et le débouter de l’ensemble de ses demandes indemnitaires, le salarié forme un pourvoi en cassation.
A l’appui de son pourvoi, il affirme que les ruptures conventionnelles qui ont une cause économique et s’inscrivent dans un processus de réduction des effectifs dont elles constituent la ou l’une des modalités, doivent être prises en compte pour déterminer la procédure d’information et de consultation des représentants du personnel applicable ainsi que les obligations de l’employeur en matière de plan de sauvegarde de l’emploi.
Il établit qu’en l’espèce les ruptures conventionnelles avaient été expressément inscrites dans le projet de réorganisation soumis à la consultation des représentants du personnel ayant abouti à des ruptures des contrats de travail et en avaient constitué l’une des modalités.
En effet, l’exposé des conséquences sociales du projet de réorganisation communiqué aux représentants du personnel laissait apparaître la suppression de 12,24 postes supprimés « compensés » par 10,37 ruptures conventionnelles liées à la clause de cession, plusieurs salariés ayant accepté une rupture conventionnelle.
Par suite le salarié prétendait que les ruptures conventionnelles avaient été intégrées au projet de réorganisation pour motif économique ayant abouti à des réductions d’effectifs et qu’elles en constituaient l’une des modalités et qu’il s’en déduisait nécessairement qu’elles avaient une cause économique et devaient être prises en compte au titre de la mise en œuvre de l’article L 1233-61 du Code du travail.
La Chambre sociale de la Haute Cour va recevoir l’argumentation du salarié.
Elle souligne que l’arrêt d’appel constate que dans l’exposé des conséquences sociales du projet de réorganisation soumis au comité d’entreprise la société faisait état de 12,24 postes supprimés compensés par 10,37 ruptures conventionnelles liées à la clause de cession, mais en retient, à tort, que ces ruptures conventionnelles intervenues au cours des deux mois précédant le licenciement ne sont pas liées au transfert des activités de l’entreprise mais résultent de l’application de la clause de cession bénéficiant aux journalistes, indépendamment de la mutation géographique envisagé et de toute réduction des effectifs.
La Cour d’appel qui a ainsi constaté que les nombreuses ruptures conventionnelles étaient intervenues dans un contexte de suppression d’emploi dues à des difficultés économiques et qu’elles s’inscrivaient dans un projet global et concerté de réduction des effectifs au sein de l’entreprise, est censurée par la Cour de cassation qui casse et annule l’arrêt d’appel.