Source : Conseil d’Etat, 21/06/2021 n°438532, mentionné dans les tables du recueil Lebon
Un contribuable a conclu avec son employeur une rupture conventionnelle prévoyant le versement d’une indemnité. Par un acte distinct, le contribuable et son employeur ont convenu que ce dernier verserait au contribuable une indemnité transactionnelle s’ajoutant à l’indemnité versée dans le cadre de la rupture conventionnelle.
Le contribuable a estimé que ces deux sommes étaient exonérées d’impôt sur le revenu ce que l’administration fiscale à remis en cause s’agissant de l’indemnité transactionnelle. Le contribuable a contesté les suppléments d’impôts mis à sa charge.
Le Conseil d’État, confirmant la position des juridictions du fond, rejette le pourvoi du contribuable.
Il rappelle tout d’abord que toute indemnité versée à l’occasion de la rupture du contrat de travail constitue, en vertu de l’article 80 duodecies du CGI, une rémunération imposable sauf s’il s’agit d’indemnités accordées par le juge du contrat de travail qui sanctionnent le défaut de respect de la procédure de licenciement, le licenciement sans cause réelle et sérieuse, la nullité du licenciement notamment pour motif discriminatoire ou pour violation d’une liberté fondamentale ou encore le non-respect de la procédure prévue en cas de licenciement collectif pour motif économique ou de la priorité de réembauche.
L’exonération, dans les cas sus visés, est également applicable, depuis la décision du Conseil Constitutionnel du 20 septembre 2013 n°2013-340 QOC, si l’indemnité versée a un caractère transactionnel. Dans ce cas, il appartient à l’administration ou au juge de rechercher la qualification à donner aux sommes objet de la transaction pour vérifier que l’exonération puisse s’appliquer. Le Conseil d’État rappelle que « la détermination par le juge de la nature des indemnités se fait au vu de l’instruction et conformément à la jurisprudence établie du juge du travail ».
En l’espèce, le contribuable a perçu deux indemnités : une indemnité liée à la rupture conventionnelle et une indemnité transactionnelle. La question en litige est de savoir si ces deux indemnités peuvent être exonérées ou s’il y a lieu de les distinguer. Cette question est inédite et la décision commentée permet de préciser les conditions d’application des exonérations prévues à l’article 80 duodecies du CGI.
Le Conseil d’État pose le principe suivant : « Lorsqu’a été conclue et homologuée une convention de rupture du contrat de travail régie par les dispositions des articles L. 1237-11 à L. 1237-16 du code du travail, cette rupture conventionnelle, exclusive du licenciement et de la démission, fait en principe obstacle à ce que l’indemnité allouée au salarié par une transaction intervenant ultérieurement puisse être regardée comme une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et exonérée d’impôt sur le revenu à ce titre ».
Il introduit une exception à ce principe : « Toutefois, il résulte des mêmes dispositions que la remise au salarié d’un exemplaire de la convention de rupture est nécessaire à la fois pour que chacune des parties puisse demander l’homologation de la convention, dans les conditions prévues par l’article L. 1237-14 du code du travail, et pour garantir le libre consentement du salarié, en lui permettant d’exercer ensuite son droit de rétractation en connaissance de cause. Il s’ensuit qu’à défaut d’une telle remise, la convention de rupture est nulle et produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ».
Dans ce cas, l’indemnité versée à titre transactionnelle sera exonérée, au même titre d’une indemnité relative à un licenciement sans cause réelle et sérieuse, car les droits du salarié n’auront pas été respectés.
En l’espèce, le contribuable avait bien reçu de la part de son employeur la convention de rupture conventionnelle. Il ne pouvait donc prétendre à l’exonération de son indemnité transactionnelle.