M. et Mme B occupaient respectivement les fonctions de président et de directrice générale de la société Établissements Jean B, spécialisée dans la menuiserie métallique et la serrurerie, dont ils sont également les fondateurs.
En 2010, lorsqu’à l’occasion de son départ à la retraite Mme B a cessé d’exercer les fonctions qu’elle occupait, ils ont cédé la totalité des titres qu’ils détenaient dans cette société, réalisant ainsi une plus-value de cession d’un montant de 1 019 351 euros, qu’ils ont déclarée sous le régime de faveur prévu à l’article 150-0 D ter du code général des impôts, applicable en cas de départ à la retraite des dirigeants de petites et moyennes entreprises.
À la suite d’un contrôle sur pièces, l’administration a remis en cause le bénéfice de ce régime aux motifs que Mme B ne remplissait pas la condition tenant à l’exercice, pendant au moins cinq ans, des fonctions de directeur général d’une société par actions et que M. B, président de la société jusqu’en 2007, avait fait valoir ses droits à la retraite plus de deux ans avant la date de la cession.
M. et Mme B ont porté le litige devant le tribunal administratif de Dijon, lequel a rejeté leur demande par un jugement du 29 décembre 2017. Le ministre de l’action et des comptes publics se pourvoit en cassation contre l’arrêt du 19 novembre 2019 par lequel la cour administrative d’appel de Lyon a, faisant droit à l’appel des intéressés, annulé ce jugement et prononcé la décharge en droits et pénalités des impositions mises à leur charge.
Le Conseil d’État rappelle dans un premier temps les dispositions des articles 150-0 A, 150-0 D bis, 150-0 D ter et 885 O bis du CGI lesquels précisent les conditions d’imposition de la plus-value réalisée par les dirigeants qui cèdent leur société à l’occasion de leur départ en retraite.
Ainsi, dans les sociétés par actions, le dispositif s’applique au cédant qui a exercé pendant les 5 années précédant la cession les fonctions de président, directeur général, président du conseil de surveillance ou membre du directoire.
Dans un second temps, le Conseil d’État rappelle les dispositions de l’article L 227-6 du Code de commerce :
« L’article L. 227-6 du code de commerce dispose que, si une société par actions simplifiée est en principe représentée à l’égard des tiers par son président, désigné dans les conditions prévues par les statuts, ces mêmes statuts “peuvent prévoir les conditions dans lesquelles une ou plusieurs personnes autres que le président, portant le titre de directeur général ou de directeur général délégué, peuvent exercer les pouvoirs confiés à ce dernier par le présent article.” »
Il résulte de ces articles que l’abattement prévu à l’article 150-0 D ter du CGI est subordonné au respect de plusieurs conditions relatives à la personne du cédant, tenant notamment à l’exercice effectif de fonctions de direction normalement rémunérées au sein de la société dont les titres sont cédés et à ce qu’il ait cessé toute fonction au sein de cette même société et fait valoir ses droits à la retraite au cours d’une période de quatre années allant de deux ans avant à deux ans après la cession.
S’agissant de la condition relative à la nature des fonctions exercées par le cédant, le 1° de l’article 885 O bis, auquel renvoie l’article 150-0 D ter, ne prévoit, dans le cas où la société dont il s’agit est une société par actions, aucune autre condition que l’exercice des fonctions de président, directeur général, président du conseil de surveillance ou membre du directoire.
En particulier, contrairement à ce que soutient le ministre, il ne découle pas des dispositions de l’article 1655 quinquies du code général des impôts selon lequel, pour l’application de ce code et de ses annexes, la société par actions simplifiée est assimilée à une société anonyme, que le bénéfice de l’avantage fiscal prévu à l’article 150-0-D ter serait subordonné, dans le cas où le cédant se prévaut de l’exercice des fonctions de directeur général d’une société par actions simplifiée, à la condition que les statuts de la société lui confèrent, au titre des pouvoirs normalement dévolus au président dont l’exercice peut lui être confié en application de l’article L. 227-6 du code de commerce, celui de représenter la société à l’égard des tiers.
En conséquence, en jugeant que l’administration ne pouvait légalement se fonder, pour remettre en cause le bénéfice de l’exonération à laquelle prétendait Mme B en sa qualité de directeur général de la société Établissements Jean B, sur le seul motif tiré de ce que les statuts de cette société par actions simplifiée ne conféraient pas au directeur général le pouvoir de la représenter auprès des tiers, la cour administrative d’appel de Lyon n’a pas commis d’erreur de droit.
Ainsi, un directeur général d’une société par actions simplifiée peut bénéficier du dispositif spécifique aux dirigeants de PME même s’il n’a pas, en vertu des statuts, le pouvoir de représenter la société à l’égard des tiers.
La solution rendue en l’espèce nous semble transposable pour l’application du dispositif actuel.