Quand la Cour de cassation outrepasse les termes de la mission strictement limitée confiée à l’architecte

Equipe VIVALDI
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Source: Cass. civ. III. 21 novembre 2019 n° 16-23509

 

Une SCI, en sa qualité de maître d’ouvrage, a fait appel à un certain nombre de constructeurs aux fins de réalisation d’un garage étant précisé qu’elle a elle-même procédé à la réalisation des remblais.

 

L’architecte s’est vu confier une mission strictement limitée à l’établissement et au dépôt de la demande de permis de construire.

 

Se plaignant d’un soulèvement du sol et des fissures sur le dallage du garage, la SCI a sollicité l’organisation d’une expertise judiciaire au contradictoire notamment de l’architecte et des entreprises en charge de la réalisation du dallage.

 

Suite au dépôt du rapport de l’Expert judiciaire, la SCI a entendu agir en responsabilité à l’encontre des intervenants à l’opération de construction.

 

La Cour d’Appel a retenu la responsabilité décennale de l’architecte en charge de l’établissement et du dépôt de la demande de permis de construire le condamnant in solidum aux côtés du maître d’œuvre et de l’entreprise en charge de l’étude de fondation à payer à la SCI la somme de 625.000 €, la Cour retenant sa responsabilité à concurrence de 25 %.

 

L’architecte a formé un pourvoi en cassation rappelant s’être vu confié uniquement une mission limitée à l’établissement d’un dossier de permis de construire, n’étant donc pas tenu de procéder à la réalisation des travaux de reconnaissance des sols ni d’attirer l’attention du maître d’ouvrage sur la nécessité d’en réaliser.

 

En outre, il était rappelé que les désordres résultaient de la présence de remblais gonflant mis en œuvre par le Maître d’ouvrage et que dans ces conditions, eu égard à sa mission strictement limitée, sa responsabilité devait être écartée.

 

Etonnamment, par arrêt en date du 21 novembre 2019, la Cour de Cassation a rejeté le pourvoi ainsi formé estimant que « Monsieur X, auteur du projet architectural et chargé d’établir les documents du permis de construire, devait proposer un projet réalisable tenant compte des contraintes du sol ».

 

En conséquence, la mauvaise qualité des remblais mis en œuvre avant l’intervention de l’architecte, cause exclusive des désordres, compromettant la solidité de l’ouvrage justifie la responsabilité décennale de l’architecte selon la Cour de Cassation.

 

Il est surprenant que la Haute juridiction ait entendu étendre la mission de l’architecte à l’étude des contraintes du sol eu égard aux termes strictement limitée de la mission qui lui avait été confiée étant rappelé que bien qu’en présence d’une présomption de responsabilité, l’imputabilité des désordres doit être démontrée.

 

Marion MABRIEZ

Vivaldi AVOCATS

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