Transformation d’une SARL en SAS et cession de titres : les droits d’enregistrement applicables dépendent de l’opposabilité de l’opération de transformation

Coralie MOREAU
Coralie MOREAU - Avocat

En cas de cession de titres, les droits d’enregistrement sont liquidés en fonction de la nature juridique des titres cédés. Pour savoir le régime applicable, il faut savoir si à la date de cession, la transformation de la société était opposable à l’administration fiscale. Le juge de l’impôt vient rappeler que l’administration fiscale appliquera les droits d’enregistrement en fonction de la forme sociale dont elle a connaissance au moment de la cession.

Cour d’appel de Lyon, 6 juillet 2023, n° 20/05110

Pour rappel, le régime actuellement en vigueur est le suivant :

  • Les cessions d’actions (titres de SAS, SA, etc.) sont soumises à un droit d’enregistrement de 0,10 % ;
  • Les cessions de parts sociales (titres de SARL) sont soumises à un taux de 3 %.

Antérieurement au 1er août 2012 (régime applicable à la date des faits), le régime applicable était le suivant :

  • 3 % pour la fraction d’assiette inférieure à 200 000 €, 0,5 % pour la fraction comprise entre 200 000 € et 500 000 000 € et 0,25 % pour la fraction excédant 500 000 000 € pour les actes portant cessions d’actions ;
  • 3 % pour les cessions de parts sociales dans les sociétés dont le capital n’est pas divisé en actions ;
  • 5 % pour les cessions de participations dans des personnes morales à prépondérance immobilière.

Compte tenu de la différence de taux applicable entre les parts sociales et les actions, avant de procéder à une cession de titres de SARL, il est conseillé de transformer la société en SAS préalablement à la cession afin de garantir une certaine économie de droits d’enregistrement au cessionnaire.

En l’espèce, la société A a acquis les titres de la société B. La société B étant une SARL, elle a été transformée en SAS avant la cession en date du 24 juillet 2012. Le même jour, un registre des mouvements de titres a été ouvert au nom de la société B.

La cession a été réalisée le lendemain de cette transformation, soit le 25 juillet 2012, le registre des mouvements de titres a ainsi été modifié en conséquence.

La déclaration de cession de droits sociaux a été déposée auprès de l’administration fiscale le 3 août 2012 et a donné lieu au paiement des droits d’enregistrement selon le barème applicable aux actions.

La transformation de la société a, quant à elle, été enregistré auprès de l’administration fiscale le 7 août 2012 et déposée au greffe en septembre 2012.

L’administration fiscale a estimé que l’opération de cession devait en réalité supporter les droits d’enregistrement selon le barème applicable pour les parts sociales dès lors que les formalités de publicité relatives à la transformation de la société n’étaient pas réalisées à la date de la cession.

L’administration fiscale a ainsi mis en recouvrement les droits supplémentaires. La société a émis une réclamation qui a été rejetée et a donc saisi le tribunal judiciaire de Lyon qui a fait droit à sa demande tendant à la décharge des droits d’enregistrement supplémentaires.

L’administration fiscale a fait appel de la décision.

La Cour d’appel donne droit à l’administration fiscale et confirme le redressement en retenant que les droits d’enregistrement sur la cession des titres doivent être liquidés selon leur nature juridique et qu’il convient de rechercher si, à la date de la cession, l’administration fiscale avait connaissance de la transformation et si celle-ci lui était ainsi opposable.

L’inscription sur le registre des mouvements de titres et le dépôt du rapport du commissaire à la transformation au greffe ne sont pas des éléments permettant à l’administration fiscale d’avoir connaissance de la transformation de la société.

La Cour retient que l’administration fiscale ne pouvait avoir connaissance de la transformation tant que le procès-verbal de l’assemblée générale décidant de la transformation n’avait pas été enregistré auprès d’elles.

Ainsi, lors d’une cession de titres et d’une transformation préalable, il convient d’être vigilent à ce que les formalités soient réalisées avant de procéder à la signature de la cession entrainant le transfert de titres.

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