Source : Cass.Civ2., 27 février 2020, n°18-19174, n°235 P+B+I
Par arrêt en date du 23 mars 2011[1] publié au bulletin, la Cour de cassation a rendu un arrêt relatif à l’ancienne procédure de saisie immobilière. La Cour précisait alors :
« Mais attendu qu’ayant exactement retenu, par motifs propres et adoptés que, tout bail, même conclu postérieurement au commandement de saisie immobilière, dont l’adjudicataire a eu connaissance avant l’adjudication, lui était opposable, la cour d’appel, qui a relevé que le cahier des charges était explicite sur la situation locative exacte du bien vendu sur saisie immobilière, comportant copies intégrales du bail, de l’avenant en date du 1er septembre 1999 au bail du 1er janvier 1995 et du bail du 1er janvier 1995 lui-même, ces deux contrats ayant fait l’objet d’ajouts par des dires déposés par le créancier saisissant les 4 et 21 avril 2000, et constaté que la vente à la barre du tribunal avait eu lieu 18 mois plus tard, le 22 novembre 2001, à la suite d’une publicité mentionnant expressément l’existence de l’avenant en cause, en a, à bon droit, déduit que la société L’Etoile II ayant eu connaissance de cet avenant avant l’adjudication, sa demande en nullité devait être rejetée »
Autrement dit, dès lors que le cahier des charges de la vente judiciaire décrit la situation locative, avec copie intégral du bail, celui-ci est opposable à l’adjudicataire.
La Cour vient ici confirmer son arrêt en arguant :
« Qu’en statuant ainsi, alors que la délivrance d’un commandement valant saisie immobilière n’interdit pas la conclusion d’un bail ou la reconduction tacite d’un bail antérieurement conclu, et que le bail, même conclu après la publication d’un tel commandement est opposable à l’adjudicataire qui en a eu connaissance avant l’adjudication, la cour d’appel a violé le texte susvisé »
La délivrance du commandement n’interdit pas la conclusion d’un bail ou la reconduction tacite d’un bail antérieur. Plus encore, le bail conclu après la publication du commandement est opposable à l’adjudicataire qui en a eu connaissance avant l’adjudication.
Le créancier poursuivant et l’adjudicataire sont confrontés à une question unique : le bail est-il mentionné dans le cahier des conditions de vente ?
Peu importe alors la date du bail, avant ou après la délivrance ou la publication du commandement, l’important est sa déclaration au créancier poursuivant qui devra le mentionner dans le cahier des conditions de vente.
On imagine alors que les potentiels acquéreurs seront vigilant à la valeur locative du bien à raison de l’opposabilité du bail et de l’impossibilité d’expulser le locataire sauf à constater un manquement contractuel.
Dans le cas où le bail n’est pas mentionné dans le cahier des conditions de vente :
L’occupant se prétend locataire après l’adjudication, le créancier poursuivant ou l’adjudicataire peuvent se prévaloir de l’article L321-4 du Code des procédures civiles d’exécution rendant inopposable le bail litigieux. L’adjudicataire pourra obtenir l’expulsion de l’occupant sans droit ni titre ;
L’occupant se prétend locataire avant la délivrance de l’acte de saisie. La Cour juge que le bail consenti par le débiteur saisi, dont la date est certaine et antérieure au commandement est opposable à l’adjudicataire sans qu’il soit nécessaire de rechercher s’il avait bien connaissance de ce bail avant la vente judiciaire. Les juges du fond devront alors vérifier que le bail est d’une durée inférieure à 12 ans et non soumis à la publicité pour son opposabilité[2]
En tout état de cause, l’adjudicataire serait en droit de rechercher la responsabilité du créancier poursuivant, voire de l’Huissier qui a rédigé le procès-verbal descriptif sans faire figurer la situation locative.
[1] Cass.Civ.23 mars 2011, n°10-10804
[2] Cass.Civ2., 6 juin 2013, n°12-19116