La Cour de Cassation apporte des précisions sur la procédure de régularisation prévue à l’article 1844-6 du code civil
Source :CCass 30/08/2023 n°22-12084 publié au Bulletin
Lors de la création de la société, les associés doivent préciser dans les statuts la durée de la structure étant précisé qu’elle ne peut excéder 99 ans. Dans la pratique, il est ainsi conseillé de prévoir la durée maximum.
Si la société n’est pas dissoute de façon anticipée par les associés ou une décision de justice ou tout autre cause visée à l’article 1844-7 du code civil, la société prend fin à l’expiration de sa durée.
Les associés peuvent tout à fait proroger la durée pour laquelle la société a été initialement prévue et ils doivent alors suivre la procédure prévue à l’article 1844-6 du code civil qui prévoit que les associés doivent se réunir au moins un an avant la date d’expiration de la société pour statuer sur sa prorogation.
Il arrive néanmoins que cette réunion n’ait pas lieu ou que les associés oublient de la tenir de sorte que la société arrive à expiration et cesse ainsi d’exister.
L’article 1844-6 du code civil prévoit dans ce cas une procédure de régularisation nécessitant l’intervention d’un juge : « Lorsque la consultation n’a pas eu lieu, le président du tribunal, statuant sur requête à la demande de tout associé dans l’année suivant la date d’expiration de la société, peut constater l’intention des associés de proroger la société et autoriser la consultation à titre de régularisation dans un délai de trois mois, le cas échéant en désignant un mandataire de justice chargé de la provoquer. Si la société est prorogée, les actes conformes à la loi et aux statuts antérieurs à la prorogation sont réputés réguliers et avoir été accomplis par la société ainsi prorogée ».
En l’espèce, les associés n’ont pas été réunis pour statuer sur la prorogation de la société et l’un d’eux a saisi, pour régularisation, la juridiction compétente qui a constaté l’intention des associés de la société et a autorisé la consultation à titre de régularisation. Un autre associé a contesté cette décision de sorte que la Cour de Cassation a été saisie.
La Cour de Cassation rejette le pourvoi et profite de l’espèce pour préciser les conditions d’application de la procédure de régularisation.
Le demandeur au pourvoi estimait que la juridiction ne pouvait autoriser la consultation de régularisation que si les associés avaient omis de proroger la société et si la preuve l’intention de proroger la durée de l’ensemble des associés était rapportée.
La Cour de Cassation écarte ses deux arguments en jugeant que : « quelle que soit la raison pour laquelle la consultation des associés à l’effet de décider si la société doit être prorogée n’a pas eu lieu, le président du tribunal, statuant sur requête à la demande de tout associé dans l’année suivant la date d’expiration de la société, peut constater l’intention des associés de proroger la société et autoriser la consultation à titre de régularisation dans un délai de trois mois. Lorsque les statuts de la société prévoient que la prorogation peut être décidée à la majorité qu’ils fixent, il suffit au président de constater que des associés représentant au moins cette majorité ont l’intention de proroger la société ».
Ainsi, la régularisation de l’absence de prorogation est possible même si cette absence ne résulte pas d’un oubli. Elle est de droit pour chaque société.
Par ailleurs, il n’est pas nécessaire de réunir l’unanimité des associés si les statuts prévoient une majorité moins forte pour l’assemblée appelée à statuer sur la prorogation de la société.
La Cour de Cassation entend ainsi que l’application du texte ne soit pas restreinte pour éviter les difficultés juridiques que l’expiration non anticipée d’une société peut causer.