Elle ne permet donc pas au salarié de réclamer le paiement de la contrepartie pécuniaire d’une clause de non-concurrence quand bien même la transaction ne comporte aucune mention à ce sujet.
Source : Cass. Soc. 17 février 2021, n°19-20.635
En l’espèce, une salariée assistante d’un service de ressources humaines licenciée pour motif personnel, convient avec son employeur de la signature d’un protocole d’accord transactionnel par lequel la société lui verse une indemnité ayant vocation à réparer l’ensemble de ses préjudices tant professionnels que moraux.
La salariée a exposé dans le protocole avoir subi un préjudice lié aux modalités d’exécution de son contrat de travail, de sa rupture, des conditions dans lesquelles elle est intervenue et au regard de ses conséquences notamment.
Elle a déclaré renoncer à toute prétention ou réclamation ou instance de quelque nature qu’elle soit, pouvant avoir sa cause, sa conséquence ou son objet directement ou indirectement dans l’exécution ou la cessation de ses fonctions…
Nonobstant cette transaction, la salariée saisit la juridiction prud’homale d’une demande d’indemnité de non-concurrence, motif pris de ce que la transaction ne comportait aucune mention relative à la clause de non-concurrence.
La Cour d’Appel fait droit à sa demande, considérant que l’employeur ne justifiait pas avoir levé la clause de non-concurrence prévue au contrat de travail, de sorte que celle-ci prenait effet, et par ailleurs, que la transaction ne comportait aucune mention relative au règlement de la question de l’indemnité de non-concurrence.
La Cour d’Appel en a en conséquence déduit que l’employeur ne pouvait opposer l’autorité de la chose jugée s’attachant à la transaction.
Elle est censurée par la Cour de Cassation qui considère que la transaction prévoit que les parties reconnaissent que leurs concessions réciproques sont réalisées à titre transactionnel, forfaitaire et définitif, afin de les remplir de tous les droits et pour mettre fin à tout différend né ou à naître des rapports de droit ou de fait ayant pu exister entre elles et déclaraient être remplies de leurs droits respectifs et renonçaient à toute action en vue de réclamer quelque somme que ce soit.
La jurisprudence de la Cour de Cassation sur la portée de la transaction a connu une évolution importante.
La Haute Cour a adopté pendant longtemps une conception restrictive de la portée de la transaction jusqu’en 1997 date à laquelle l’ Assemblée Plénière a décidé que la transaction « forfaitaire et définitive « rédigée en termes généraux empêche le salarié de réclamer après sa signature une prime d’intéressement.[1]
La Chambre Sociale n’a pas systématiquement adopté la même conception.
Elle a jugé que les clauses contractuelles destinées à trouver application postérieurement à la rupture du contrat de travail ne sont pas affectées par la transaction intervenue entre les parties pour régler les conséquences d’un licenciement ; la transaction ne faisant pas la moindre référence à la clause de non-concurrence, l’employeur reste tenu au paiement de l’indemnité compensatrice de la clause de non-concurrence[2].
Elle a confirmé sa position par un arrêt en date du 18 janvier 2012[3].
La Cour de Cassation a considéré aussi qu’en l’absence de mentions expresses dans la transaction, « le salarié ne pouvait être considéré comme ayant renoncé à la priorité de réembauchage qui est la date de signature de la transaction, constitue un droit dont l’exercice était éventuel, ce dont il résultait qu’il n’était pas compris dans l’objet de ladite transaction ».
Elle a amorcé l’ évolution de sa jurisprudence par un arrêt en date du 5/11/2014, par lequel elle a jugé qu’un salarié ne pouvait prétendre à de dommages et intérêts pour perte de salaire et indemnité compensatrice de préavis , la transaction étant rédigée en termes généraux.
Par un arrêt en date du 11 janvier 2017, elle a exclu la possibilité pour le salarié de réclamer un préjudice d’anxiété dont la reconnaissance issue d’une construction jurisprudentielle était postérieure à la signature de la transaction.
La Cour de Cassation a précisé par un arrêt en date du 20 février 2019, s’agissant de la priorité de réembauche que dès lors que la transaction réglait irrévocablement tout litige lié à l’exécution de la rupture du contrat de travail en dehors de l’application des autres mesures du dispositif d’accompagnement social et que les parties ont renoncé à poursuivre toute instance ou action de quelque nature que ce soit, trouvant sa cause ou dont l’origine a trait au contrat de travail, à son exécution ou sa rupture[4], le salarié ne peut invoquer la violation par l’employeur de son obligation de réembauche.
La Cour de Cassation confirme ici son interprétation plus extensive de la portée de la transaction rédigée en termes généraux .
[1] Cass Ass plén 4/7/1997 n°93-43375
[2] Cass. Soc. 1er mars 2000, n°97-43.471
[3] Cass. Soc. 18 janvier 2012, n°10-14.974
[4] Cass. Soc. 20 février 2019 n°17-19.676