Obligation de reclassement d’un salarié déclaré inapte après un accident de travail et après transfert de l’entreprise à une nouvelle entité.

Christine MARTIN
Christine MARTIN - Avocat associée

SOURCE : Arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation du 06 mars 2019, n° 17-28.478 (F-P+B).

 

Un salarié a été engagé le 22 avril 2003 par une société dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée en qualité de menuisier poseur, catégorie « ouvrier ».

 

Le 20 mai 2013, la société a cédé son fonds à un repreneur qui a repris l’ensemble des contrats de travail.

 

A compte du 04 juin 2013, le salarié a été placé en arrêt maladie et a ensuite sollicité le bénéfice de la législation relative aux maladies professionnelles.

 

A l’issue de la seconde visite médicale de reprise du 24 septembre 2014, le médecin du travail a déclaré le salarié inapte à son poste de menuisier poseur, de sorte qu’après un entretien préalable fixé au 20 octobre 2014, son nouvel employeur lui a notifié, par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 octobre 2014, son licenciement pour inaptitude d’origine professionnelle et impossibilité de reclassement.

 

Contestant son licenciement, le salarié va saisir le Conseil des Prud’hommes de diverses demandes indemnitaires, considérant que l’employeur n’avait pas respecté ses obligations de reclassement et de consultation préalable des délégués du personnel.

 

Il va être débouté par les Premiers Juges, puis par la Cour d’Appel de BOURGES laquelle, dans un Arrêt du 03 juin 2016, va considérer :

 

– Sur la consultation des délégués du personnel, que le nouvel employeur ne pouvait se voir tenu à plus d’obligations que le précédent employeur lequel, par le seul effet de la cession, lui avait transféré l’ensemble de ses droits et obligations résultant des contrats de travail et, qu’en outre, aucune disposition légale n’imposait la tenue de nouvelles élections à la charge de l’employeur cessionnaire, de sorte que la procédure de licenciement pour inaptitude diligentée par le nouvel employeur l’a été au bénéfice d’un procès-verbal de carence établi à l’issue du second tour de scrutin valable jusqu’au 21 décembre 2016 et en l’absence de demande de tenue de nouvelles élections formulées par un salarié ou une nouvelle organisation syndicale. La Cour d’Appel en conclut que le nouvel employeur n’avait pas manqué à son obligation légale de consultation des délégués du personnel qu’il n’avait pas pu diligenté en l’absence, précisément, de délégués du personnel au sein de l’entreprise transférée.

 

– Sur l’obligation de reclassement, qu’en présence d’une proposition par l’employeur au salarié d’un poste spécialement aménagé d’agent technique menuisier et multiservices, laquelle proposition du 02 octobre 2014 est restée sans réponse de la part du salarié jusqu’au 28 octobre 2014, soit postérieurement à la notification de son licenciement, l’employeur a proposé, avec l’accord du médecin du travail, au salarié un poste spécialement adapté à ses capacités physiques, de sorte qu’il a respecté son obligation de reclassement et que le refus opposé par le salarié d’un poste approprié ses capacités physiques sans raison valable avec maintien de son salaire, sa classification et son temps de travail habituel, présentait un caractère abusif et qu’il y avait lieu de le priver de l’indemnité spéciale de licenciement.

 

Ensuite de cette décision, le salarié forme un pourvoi en Cassation.

 

A l’appui de son pourvoi, le salarié prétend, d’une part, qu’après modification dans la situation juridique de l’employeur, celui-ci ne pouvait légalement se prévaloir du procès-verbal de carence établi par l’ancien employeur faute pour lui d’avoir mis en place des élections des délégués du personnel. Il prétend, en outre, que l’employeur n’avait pas caractérisé le maintien de l’autonomie de l’entreprise transférée, condition pour que le mandat de délégué du personnel de l’entreprise ayant fait l’objet de la modification subsiste au sein de l’entreprise repreneuse.

 

Mais la Chambre Sociale de la Haute Cour ne va pas suivre le salarié dans son argumentation.

 

Relevant que, d’une part, le fonds avait été cédé en sa totalité et que les conditions de la cession et de la modification de la dénomination avaient fait ressortir que l’entité transférée avait conservé son autonomie et que, d’autre part, la consultation des délégués du personnel n’avait pas pu être diligentée par l’employeur en l’absence de délégués du personnel au sein de la société repreneuse dûment constatée selon procès-verbal de carence établi en date du 21 décembre 2012 par la société vendeuse à l’issue du second tour de scrutin et valable jusqu’au 21 décembre 2016, en l’absence de demande d’organisation d’élections professionnelles formée par un salarié ou une organisation syndicale, elle rejette le pourvoi du salarié, estimant que la Cour d’Appel a légalement justifié sa décision.

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