Illustration jurisprudentielle de la comparaison entre deux marques : quand la similitude conceptuelle se révèle insuffisante pour qualifier un risque de confusion.

Vianney DESSENNE
Vianney DESSENNE - Avocat

Source : Legalis, article du 14 décembre 2021

 

La société MY LUXURY TRAVEL a déposé le 8 novembre 2012 auprès de l’INPI la marque semi-figurative suivante pour désigner des services d’organisation et de réservation de voyages :

 

La société MY LUXURY VOYAGE a déposé le 15 janvier 2016 auprès de l’INPI la marque semi-figurative suivante pour également désigner des services d’organisation et de réservation de voyages :

 

C’est dans ces conditions que a société MY LUXURY TRAVEL a assigné son concurrent devant le TGI de Marseille en annulation de marque, en contrefaçon de marque et, subsidiairement, en concurrence déloyale.

 

Suivant jugement en date du 23 janvier 2020, cette juridiction avait débouté la requérante de l’ensemble de ses demandes, laquelle interjetait appel.

 

Dans un arrêt du 9 décembre 2021, la Cour d’appel d’Aix-en-Provence a confirmé les termes du jugement attaqué, s’attachant à comparer les marques litigieuses dans leur ensemble et retenant ainsi que :

 

  Le signe verbal MY LUXURY TRAVEL désigne de manière évidente le service désigné, à savoir la fourniture de voyages organisés luxueux et personnalisés, l’utilisation de la langue anglaise n’étant pas de nature à infirmer ce constat, les termes utilisés étant très usuels et de ce fait compréhensibles.

 

  Si l’absence de distinctivité de l’élément verbal de la marque est établi, il n’en demeure pas moins que prise dans son ensemble, la marque complexe présente un caractère arbitraire pour désigner le service de voyage ou séjour organisé ;

 

Elle est en effet composée d’un globe terrestre en couleur évocateur certes de voyages, mais qui ne peut être considéré comme désignant l’activité elle-même, du signe MY en lettres manuscrites jaunes renforçant la symbolique du terme, du mot LUXURY en lettres capital, et enfin du mot TRAVEL, placé en dessous des deux autres et au demeurant difficilement lisible ;

 

Cet ensemble graphique pris dans sa globalité est certes évocateur du monde du voyage, et la marque ainsi composée est manifestement très faiblement distinctive, mais il ne peut être jugé qu’elle désigne le service proposé.

 

  Visuellement les marques litigieuses présentent d’importances différences : la première a pour entame visuelle la représentation d’un globe terrestre avec en dessous les termes LUXURY TRAVEL différenciés par leur calligraphie et leur couleur, le tout sur fond blanc ;

 

La seconde a pour entame visuelle le mot MY en lettres dorées enlacées portant un liseré noir, puis en lettres dorées plus petites les mots LUXURY VOYAGE, ces signes étant sur un fond noir ;

 

Phonétiquement, si les deux premiers mots sont rigoureusement identiques, la finale diffère totalement et ne peut porter à confusion.

 

A ce stade, la Cour en conclut que les deux marques sont d’une très faible distinctivité, et leur similitude résulte précisément du fait qu’elles sont particulièrement évocatrices de l’activité qu’elles désignent.

 

En revanche, la Cour relève qu’existent entre les deux marques une quasi-identité conceptuelle, les deux signes verbaux désignant le monde du voyage luxueux et personnalisé, sans que la différence entre l’Anglais et le Français pour désigner le voyage ne puisse être considérée comme essentielle dès lors qu’il s’agit d’un terme courant compréhensible pour un public francophone.

 

Retenant finalement que cette seule similitude conceptuelle, elle affirme cependant que le risque de confusion n’apparaît pas en l’espèce constitué, l’attention du public concerné se portant manifestement plus sur l’impression d’ensemble produite par les signes complexes, que sur le seul signe verbal qui, lui, est essentiellement évocateur de l’activité proposée.

 

S’agissant en dernier lieu du fondement de concurrence déloyale, celui-ci ne saurait être qualifié dès lors que le risque de confusion n’est pas caractérisé.

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