SOURCE : Arrêt de la Chambre sociale de la Cour de Cassation du 25 mars 2020, numéro 18-23.682 (FS-P+B)
Une salariée engagée le 2 juillet 2012 dans le cadre d’un contrat de professionnalisation en qualité d’assistante dentaire a été convoquée à un entretien préalable au licenciement le 7 octobre 2013 et licenciée pour faute grave le 25 octobre 2013.
Soutenant avoir été victime de harcèlement sexuel, la salariée a déposé une plainte pénale pour harcèlement sexuel à l’encontre de son employeur et a saisi la juridiction prud’homale afin de contester son licenciement.
Par jugement du 28 juillet 2016, devenu définitif, le Tribunal Correctionnel d’ANGERS a relaxé l’employeur des fins de la poursuite pour harcèlement sexuel.
Toutefois, la Cour d’Appel d’ANGERS, dans un arrêt rendu le 6 septembre 2018, va accueillir les demandes de la salariée et considérant que celle-ci a été victime de harcèlement sexuel, déclarer son licenciement nul, de sorte qu’elle condamne l’employeur à lui verser des dommages et intérêts.
Ensuite de cette décision, l’employeur forme un pourvoi en cassation.
A l’appui de son pourvoi, il prétend que le Juge civil ne pouvait méconnaître ce qui a été jugé par le Juge pénal et que celui-ci l’ayant relaxé des fins de poursuite de harcèlement sexuel, le Juge civil ne pouvait entrer en voie de condamnation à son égard.
Il souligne également qu’il résulte des motifs du jugement correctionnel rendu le 28 juillet 2016 par le Tribunal Correctionnel d’ANGERS, que la matérialité des faits de harcèlement sexuel n’était pas établie à défaut pour l’enquête d’avoir révélé des faits précis dont les autres assistantes dentaires auraient pu être témoins concernant la salariée plaignante, tout en soulignant que celle-ci n’avait jamais déposé plainte pour harcèlement sexuel avant son licenciement, de sorte que le Juge pénal avait pu en conclure que l’élément matériel n’était pas établi. Ces faits s’imposant au Juge civil selon l’employeur.
Mais les Hauts Magistrats de la Chambre Sociale ne vont pas suivre l’employeur dans son argumentation.
Soulignant que, s’il résulte des articles 1351 du Code Civil et 480 du Code de Procédure Civile, que les décisions définitives des juridictions pénales statuant au fond ont, au civil, autorité absolue à l’égard de tous en ce qui concerne ce qui a été nécessairement jugé quant à l’existence du fait incriminé, sa qualification et la culpabilité ou l’innocence de ceux auxquels le fait est imputé, la Cour d’Appel relève toutefois qu’en l’espèce le jugement de relaxe du Tribunal Correctionnel était fondé sur le seul défaut d’élément intentionnel.
Or, la caractérisation de faits de harcèlement sexuel en droit du travail telle que définie à l’article L1153-1 alinéa 1° du Code du Travail ne suppose pas l’existence d’un élément intentionnel.
Par suite et en conséquence, c’est à bon droit que la Cour d’Appel a pu retenir que la décision du Juge pénal qui s’est borné à constater l’absence d’éléments intentionnels, ne privait pas le Juge civil de la possibilité de caractériser des faits de harcèlement sexuel de la part de l’employeur.
Par suite, la chambre sociale rejette le pourvoi.