Désignation d’un Représentant de Section Syndicale : la Cour de cassation interroge le Conseil Constitutionnel sur le critère de la transparence financière.

Thomas T’JAMPENS
Thomas T’JAMPENS

SOURCE : Arrêt de la Chambre sociale de la Cour de Cassation du 29 janvier 2020, n° 19-40.034

 

Une union syndicale a informé l’employeur de la désignation d’un salarié en qualité de représentant de section syndicale au sein de l’un des établissements de l’entreprise.

 

La société a saisi le tribunal d’instance en annulation de cette désignation, au motif que le syndicat ne satisfaisait pas au critère de la transparence financière.

 

Ce critère est en effet exigé depuis un arrêt de la Chambre sociale de la Cour de cassation[1] qui avait jugé que « tout syndicat doit, pour pouvoir exercer des prérogatives dans l’entreprise, satisfaire au critère de transparence financière ».

 

Or si le critère de la transparence financière du syndicat est déterminant dans l’appréciation de la représentativité d’un syndicat, il ne saurait l’être pour un syndicat non représentatif.

 

De sorte qu’il a été soulevé, que la décision de la Cour de cassation porte atteinte au principe de la liberté syndicale puisqu’elle ajoute une condition qui n’est pas dans la loi.

 

En effet, chaque syndicat qui constitue, une section syndicale au sein de l’entreprise ou de l’établissement d’au moins 50 salariés, peut, s’il n’est pas représentatif dans l’entreprise ou l’établissement, désigner un représentant de la section pour le représenter au sein de l’entreprise ou de l’établissement.

 

L’article L. 2142-1 du Code du travail, n’impose au syndicat qui souhaite procéder à cette désignation, que le respect des valeurs républicaines, son indépendance, une ancienneté supérieure à 2 ans ainsi que plusieurs adhérents.

 

Dans ces conditions, le tribunal d’instance a transmis la Question Prioritaire de Constitutionnalité suivante : l’article L. 2121-1 tel qu’interprété par la Cour de cassation est-il conforme à la Constitution ?

 

Soumise à l’examen de la Cour de Cassation, la Haute Juridiction considère qu’il y a lieu de renvoyer au Conseil Constitutionnel dans la mesure où sa jurisprudence antérieure a eu pour effet un changement de circonstance de droit qui doit être tranché.

 

La doctrine s’accordait à dire à l’occasion de l’arrêt intervenu en 2017, que la décision de la Cour de cassation avait pour résultat de réparer une incohérence législative.

 

En effet, l’article L. 2135-1 du Code du travail qui exige que tout syndicat tienne des comptes annuels, aurait dû conduire à faire de l’exigence de transparence financière une condition d’implantation dans l’entreprise de tout syndicat.

 

L’idée sous-jacente étant qu’il existe deux catégories de critères afin d’apprécier la représentativité d’un syndicat.

 

Ainsi, la première catégorie relative aux qualités et à la compétence du syndicat pour s’implanter dans une entreprise (respect des valeurs républicaines, l’indépendance et l’ancienneté de deux ans dans le champ géographique et professionnel couvrant l’entreprise et la transparence financière) serait, des conditions préalables à l’exercice de toute prérogative syndicale dans l’entreprise.

 

Tandis que les autres critères d’appréciation (audience, effectifs et cotisations influence), qui établissement la représentativité du syndicat dans cadre donné, ne devrait être exigé que pour un syndicat qui se revendique comme représentatif.

 

Reste à savoir si le Conseil Constitutionnel pointera cette incohérence textuelle…

 

[1] Cass. soc., 22 févr. 2017, n° 16-60.123

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