Crédit affecté : Négligence de la banque…et de l’emprunteur…

Jacques-Eric MARTINOT
Jacques-Eric MARTINOT - Avocat

Source : Cass.Civ.1., 20 mai 2020, F-P+B, n° 18-23529

 

La responsabilité du prêteur est souvent engagée, surtout pour cacher la faute de l’emprunteur qui voudrait amoindrir sa responsabilité, et dans le cas d’espèce, un cas bien connu de panneaux photovoltaïques.

 

Une banque octroie un prêt le 7 mai 2013destiné à financer l’achat et la pose de panneaux photovoltaïques.

 

Constatant l’absence de raccordement de l’installation, les emprunteurs ont assigné la société prise en la personne de son liquidateur judiciaire et logiquement la banque aux fins de résolution des contrats et réparation du préjudice.

 

Par arrêt en date du 28 mars 2018, la Cour d’appel d’AMIENS condamnera les emprunteurs à rembourser la banque du capital emprunté et condamnera cette dernière à 7.000 € de dommages-intérêts.

 

En effet, la Cour considère que la banque a commis une faute dans la libération des fonds. Faut-il rappeler en effet que la banque ne doit libérer les fonds que sur attestation de la livraison du bien objet du crédit affecté.

 

Les emprunteurs forment alors un pourvoi, rejeté en définitive.

 

En effet, dans son attendu, la Cour précise :

 

« 4. Après avoir constaté la livraison des panneaux photovoltaïques, mais l’absence de démarches en vue de leur raccordement au réseau, et prononcé en conséquence la résolution du contrat de vente et celle du crédit affecté, ainsi que la déchéance du droit aux intérêts, l’arrêt relève, d’abord, que la banque a libéré́ les fonds sans s’assurer que les emprunteurs avaient régularisé le contrat principal, lequel a été conclu le 24 octobre 2013, postérieurement au certificat de livraison signé le 6 août 2013 par M. Y… et le 9 octobre suivant par son épouse, et qu’elle a ainsi engagé sa responsabilité́.

 

5. Il retient, ensuite, que les emprunteurs ont eux-mêmes fait preuve de légèreté́ en acceptant la mise en œuvre à leur domicile de l’installation, avant même la signature du contrat de vente, et en certifiant, d’une part, l’exécution d’un contrat en réalité́ inexistant, d’autre part, l’exécution d’une prestation en vérité́ inachevée.

 

Ayant ainsi déduit de ces constatations que les parties avaient chacune commis une faute, la cour d’appel a pu décider que les emprunteurs étaient tenus de rembourser le capital prêté́, sous déduction de la somme de 9 000 euros dont elle a souverainement estimé qu’elle réparerait le préjudice subi par eux du fait de la faute de la banque »

 

Irréprochable !

 

La Cour fait une stricte application des dispositions de l’article 312-48 du Code de la consommation :

 

« Les obligations de l’emprunteur ne prennent effet qu’à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation.

 

En cas de contrat de vente ou de prestation de services à exécution successive, les obligations prennent effet à compter du début de la livraison ou de la fourniture et cessent en cas d’interruption de celle-ci. »

 

Une obligation pèse sur le prêteur qui doit vérifier que le contrat principal, objet du prêt, a été conclu et exécuté. A défaut, il pourra être privé du remboursement du capital prêté.

 

Aussi, et la Cour le démontre bien, l’emprunteur ne doit pas faire preuve de légèreté et commettre de faute de nature à engager sa responsabilité. L’exécution anticipée sur la signature du contrat principal en est un exemple.

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