Covid 19 : Prévention des difficultés des entreprises renforcée

Jacques-Eric MARTINOT
Jacques-Eric MARTINOT - Avocat

Source : Ord. n° 2020-596, 20 mai 2020, JO : 21 mai

 

L’ordonnance du 20 mai 2020 n°2020-596 n’est que la consolidation de l’ordonnance du 27 mars 2020 n° 2020-341. Elle renforce l’information du Tribunal sur la détection des difficultés des entreprises d’une part et l’efficacité de la procédure de conciliation.

 

I – Alerte du commissaire aux comptes au Président du Tribunal.

 

Lors de son activité, si le commissaire aux comptes relève des faits de nature à compromettre la continuité de l’exploitation de la personne morale, il doit informer les dirigeants.

 

A défaut de réponse dans un délai fixé de quinzaine, où à défaut de mesure permettant d’assurer la continuité de l’activité, le commissaire aux comptes informe le Président du Tribunal.[1]

 

Aussi, lorsque l’urgence commande l’action de mesures immédiates où en cas de refus exprès, le commissaire aux comptes peut informer le Président du Tribunal dès la première information faite au dirigeant où au Conseil d’administration.

 

Cette information s’accompagne de tous les documents utiles à l’information ainsi qu’un état des raisons conduisant à la constatation des insuffisances des décisions prises. Il peut également, de sa propre initiative ou à celle du Président du tribunal, transmettre toutes informations complémentaires permettant de justifier la situation économique et financière de l’entreprise.

 

Le commissaire aux comptes est alors délié du secret professionnel.

 

Ces dispositions visent à permettre une convocation plus rapide par le Président du Tribunal et par la suite, si le Président dispose d’informations pertinentes, les transmettre au Ministère public qui pourra saisir le Tribunal aux fins d’ouverture d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire.

 

II – La conciliation se voit également renforcée par la possible suspension des poursuites de certains créanciers.

 

Ces dispositions sont érigées par l’article 2 de l’ordonnance commentée.

 

Cet article met en place une suspension des poursuites de certains créanciers à l’image de celle déjà existante dans les cas d’ouverture d’une procédure collective (interruption où interdiction des actions visant à obtenir la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent où à la résolution d’un contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent et arrêt où interdiction des procédures d’exécution).

 

Cette suspension n’a pas un caractère général. Le débiteur doit demander au Président du Tribunal de l’appliquer à un créancier appelé à la conciliation et qui n’accepte pas, dans le délai imparti par le conciliateur, de suspendre l’exigibilité de sa créance. Cette demande peut également avoir pour objet l’échelonnement ou le report du paiement des sommes dues.

 

Ces mesures auront effet jusqu’au terme de la mission du conciliateur.

 

Cette mesure vise à préserver le temps de la négociation et à titre conservatoire, ses capacités à maintenir son activité.

 

Enfin, l’ordonnance prévoit que le débiteur peut solliciter, en parallèle de l’ouverture d’une conciliation, le bénéfice de l’article 1345-5 du Code de procédure civil avant toute mise en demeure où poursuite à l’égard du créancier, à savoir l’octroi de délai de grâce. Le juge pourra alors octroyer un délai allant jusqu’à 2 ans.

 

En résumé, les procédures préventives se voient renforcées tout en s’inscrivant dans la plus grande confidentialité.

 

Ces dispositions demeurent transitoires, car applicables jusqu’au 31 décembre 2020,[2] mais l’on pourrait imaginer une pérennisation de certaines de ces mesures au regard de leur efficacité.

 

[1] Articles L231-1 et 2 et L612-3 du Code de commerce

 

[2] Article 10 de l’ordonnance du 20 mai 2020

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