Source : CE 24/10/2018 n°416676 mentionné dans les tables du recueil Lebon
En l’espèce des contribuables, ayant omis de déclaré une plus-value, ont fait l’objet d’un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle (ESFP) qui s’est soldé par un rappel d’impôt sur le revenu qu’ils ont contesté.
Ils estimaient que l’envoi, le même jour, de l’avis de vérification les information de la mise en place de l’ESFP à leur encontre et d’une mise en demeure d’avoir à déclarer la plus-value omise entachait d’irrégularité de la procédure en ce qu’ils avaient été privé de la garantie de disposer d’un délai raisonnable entre la réception de l’avis de vérification et le début du contrôle.
Les contribuables ont fait l’objet de deux procédures distinctes : un ESPF prévu aux article L12 et L47 du LPF et une taxation d’office prévue aux articles L66 et L67 du LPF.
Ces procédures ayant des conséquences fiscales importantes des garanties pour le contribuable sont prévues.
Le Conseil d’Etat procède à l’examen du respect de ces dispositions avant de se prononcer sur le pourvoi des contribuables.
S’agissant de la procédure d’ESFP
Le Conseil d’Etat déduit des dispositions de l’article L12 du LPF prévoyant le champ d’application du contrôle que « le contrôle de la cohérence entre les revenus déclarés et la situation d’ensemble du contribuable, qui constitue l’objet de l’examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, ne peut débuter avant l’expiration du délai dont ce dernier dispose pour souscrire sa déclaration de revenu global, le défaut de souscription de cette déclaration ou d’une déclaration de revenus catégoriels ne fait pas obstacle à ce que l’administration engage, après l’expiration du délai de déclaration, un tel examen ».
Il déduit en outre des dispositions de l’article L47 du LPF prévoyant les modalités d’information du contribuable du contrôle que « l’administration ne peut engager un contrôle visant à vérifier la cohérence entre, d’une part, les revenus déclarés et, d’autre part, la situation patrimoniale, la situation de trésorerie et les éléments du train de vie des membres d’un foyer fiscal avant l’expiration d’un délai raisonnable[1] à compter de la réception, par le contribuable concerné, de l’avis l’informant de ce contrôle ».
S’agissant de la taxation d’office
Le Conseil d’Etat déduit des dispositions des articles L66 et 67 du LPF que « l’administration est en droit, lorsqu’un contribuable ne s’est pas conformé aux obligations déclaratives qui lui incombent, de recourir à la procédure de taxation d’office, sous réserve de mettre ce dernier, au préalable, en demeure de régulariser sa situation en souscrivant, dans un délai de 30 jours, une déclaration de revenus ».
Pour rejeter le pourvoi des contribuables, le Conseil d’Etat juge que l’envoi simultané d’un avis de vérification et d’une mise en demeure avant taxation d’office est possible sans que cela n’entache d’irrégularité de la procédure d’ESFP.
Selon lui, « cette mise en demeure ne peut être regardée comme participant du contrôle de cohérence entre les revenus déclarés par ce contribuable et sa situation patrimoniale, sa situation de trésorerie ou son train de vie, mais a seulement pour objet de permettre la réalisation de ce contrôle dans des conditions plus satisfaisantes s’agissant des revenus déclarés ».
Cette rédaction ne manque pas d’étonner.
S’il est constant que la mise en œuvre d’une procédure d’ESFP n’empêche pas l’administration fiscale d’utiliser les autres procédures à sa disposition pour exercer son pouvoir de contrôle (par exemple le droit de communication), il semble osé d’invoquer le confort du service pour valider la chronologie choisie par le service.
Si on peut effectivement considérer que ces deux procédures sont indépendantes l’une de l’autre et que leur mise en œuvre simultanée ne va pas réellement léser le contribuable (le service n’avait pas besoin de la procédure de taxation d’office pour obtenir les informations relatives à la plus-value qui n’a pas été déclarée mais cela lui permet d’avoir les informations plus rapidement), cela donne le ton sur l’accueil que le Conseil d’Etat fait aux procédures invoquant un vice de procédure… il faut vraiment une violation substantielle des garantie du contribuable pour que le confort du service ne triomphe pas…
Caroline DEVE
Vivaldi-Avocats
[1] La jurisprudence du Conseil d’Etat a fixé à deux jours ouvrés ce délai raisonnable