Quelle valeur pour la preuve récoltée sur la clé USB personnelle du salarié ?

Manon BARTIER
Manon BARTIER

L’utilisation, par l’employeur, de fichiers contenus au sein d’une clé USB personnelle appartenant à un salarié de l’entreprise, constitue une atteinte à la vie privée de ce dernier ; néanmoins, si l’utilisation de cette preuve déloyale est indispensable à l’exercice du droit de la preuve par l’employeur, alors l’atteinte ne sera pas de nature à empêcher la production des éléments récoltés.

Source : Cass. Soc., 25 septembre 2024, n°23-13.992 – Société Verre équipements

En droit civil, la production, par l’une des parties, d’une preuve jugée déloyale ou illicite n’implique pas nécessairement son écartement des débats. Le juge statue alors sur la recevabilité de l’élément en se basant sur l’atteinte potentielle qu’elle porterait à l’équité de la procédure, avec une balance nécessaire entre le droit de la preuve (par tout moyen), et les droits antinomiques en présence.

L’assemblée plénière de la Cour de Cassation avait déjà tranché sur la question de l’admissibilité d’une preuve déloyale en mettant en exergue le principe selon lequel la production d’un tel élément doit être indispensable à l’exercice du droit de la preuve, et que l’atteinte au droit entravé soit strictement proportionnée au but poursuivi (Cass. ass plen., 22 décembre 2023, n°20-20.648).

La chambre sociale a donc repris et adapté ce principe à sa matière, en instaurant la méthode de vérification suivante :

  • Le contrôle de l’employeur était-il légitime en ce qu’il existait des raisons concrètes de procéder à une telle surveillance du salarié?
  • Le résultat obtenu n’aurait-il pas pu être identique en usant de moyen plus respectueux de la vie personnelle du salarié?
  • L’atteinte à la vie personnelle du salarié est-elle suffisamment minime pour être proportionnée au but recherché par l’utilisation des preuves récoltées?

En l’espèce, une assistante commerciale a été licenciée pour faute grave, après avoir copié sur plusieurs clés USB de nombreux fichiers appartenant à l’entreprise ; elle contestait la licéité du contrôle opéré par son employeur sur le contenu des clés USB qui lui étaient personnelles.

Deux éléments importants dans cette affaire : l’absence de la salariée à son poste et l’absence de connexion des clés USB à l’ordinateur professionnel de cette dernière lors du contrôle. Et ce sont ces deux éléments de fait qui, selon la Chambre sociale, ont contribué à caractériser l’atteinte à la vie privée de la salariée.

La reconnaissance de cette atteinte à la vie privée n’a néanmoins pas suffit à faire écarter les éléments récoltés des débats, de sorte que le licenciement pour faute grave ne pouvaient, au regard de l’importance des documents retrouvés, qu’être fondé en l’espèce.

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