Aux termes d’un arrêt en date du 13 juin 2024, la troisième chambre civile de la Cour de cassation juge que les dispositions du Code de commerce relatives au droit de préemption du locataire commercial (art. L.145-46-1 du C.com) ne trouvent pas application aux ventes amiables sur autorisation de justice, n’ayant pas le caractère d’une vente volontaire.
SOURCE : Cass. civ 3ème, 13 juin 2024, n°23-13728, Inédit
Aux termes d’un arrêt en date du 13 juin 2024, la troisième chambre civile juge que les dispositions du Code de commerce relatives au droit de préemption du locataire commercial (article L.145-46-1 du Code de commerce) ne trouvent pas application aux ventes amiables sur autorisation de justice, n’ayant pas le caractère d’une vente volontaire.
La vente était intervenue dans le cadre d’une procédure de saisie immobilière.
Cette décision met à nouveau en lumière le caractère prépondérant de la volonté du propriétaire bailleur, dans la vente des murs objet du bail commercial, pour déclencher l’application de l’ article L.145-46-1 du Code de commerce dont bénéficie le locataire d’ordre public.
Dans l’arrêt commenté, la Cour fait expressément référence à un arrêt du 30 novembre 2023[1], aux termes duquel la troisième chambre civile avait jugé que les dispositions du Code de commerce relatives au droit de préemption du locataire commercial ne trouvaient pas application aux ventes faites d’autorité de justice.
Cet arrêt s’inscrit dans l’œuvre de construction doctrinale de la Cour de cassation sur le champ d’application du droit de préférence du locataire, dans l’hypothèse de la vente des murs objets du bail commercial. A ce titre, plusieurs décisions méritent d’être soulignées :
- Arrêt du 17 mai 2018[2] : la troisième chambre civile refuse d’appliquer le droit de préemption du locataire à une vente judiciaire, spécifiquement une vente sur adjudication consécutive à une saisie immobilière, qui ne pouvait être considérée comme un acte volontaire ;
- Arrêt du 15 février 2022[3], confirmé par un autre arrêt du 23 mars 2022[4] : la Haute Cour énonce que la vente de gré à gré d’un actif immobilier dépendant d’une liquidation judiciaire est une vente faite d’autorité de justice, si bien que le droit légal de préemption du locataire commercial n’est pas applicable.
De ce périple jurisprudentiel, on en déduit le droit positif selon lequel la volonté de vendre du bailleur (article L.145-46-1 du Code de commerce : « envisage de ») constitue l’élément fondamental et déclencheur du droit de préférence du locataire commercial. Si l’élément intentionnel n’est pas caractérisé, le droit de préférence est exclu.
Au cas d’espèce, la vente amiable de l’immeuble litigieux ayant été autorisée par le juge de l’exécution dans le cadre d’une procédure de saisie immobilière, et l’aspect volontariste de la cession n’étant pas caractérisé s’agissant d’une vente forcée, le droit de préemption du locataire ne peut donc s’appliquer.
Pour être complet, rappelons les termes de l’arrêt du 29 juin 2023[5] à l’origine de la consécration jurisprudentielle de l’exclusion des locaux à usage industriel du champ d’application du droit de préemption instauré par la loi Pinel, au profit du locataire.
[1] Cass. civ 3ème, 30 novembre 2023, n°22-17505, FS – B
[2] Cass. civ 3ème, 17 mai 2018, n°17-16113, FS – P + B + I
[3] Cass. civ 3ème, 15 février 2022, n°21-16475, FS – B
[4] Cass. civ 3ème, 23 mars 2022, n°20-19174, FS – B
[5] Cass. civ 3ème, 29 juin 2023, n°22-16034, FS – B