La sanction en cas de défaut de mise en place des élections professionnelles.

Thomas T’JAMPENS
Thomas T’JAMPENS

SOURCE : Arrêt de la Chambre sociale de la Cour de cassation du 8 janvier 2020, n° 18-20.591, F-D

 

Le cadre d’un cabinet d’experts-comptables a informé son employeur qu’il souhaitait faire valoir ses droits à retraite, invoquant des manquements de ce dernier.

 

Lors de sa période de préavis dont il avait été dispensé, le salarié a sollicité de son employeur l’organisation des élections de délégués du personnel dans les plus brefs délais au sein de l’Unité Economique et Social.

 

L’employeur a finalement organisé[1] les élections professionnelles et un procès-verbal de carence a été dressé postérieurement au départ du salarié.

 

Toutefois le salarié a saisi la juridiction prud’homale afin que son départ en retraite soit requalifié en licenciement abusif mais également que son employeur soit condamné à lui verser des dommages et intérêts pour absence d’organisation d’élections des représentants du personnel.

 

Le Conseil de Prud’hommes, comme la Cour d’appel déboutent le salarié de l’intégralité de ses demandes.

 

En effet, la Cour a relevé que le salarié n’avait interpellé l’employeur au sujet de l’organisation des élections des délégués du personnel qu’au terme d’une collaboration de 18 ans et pendant son délai de préavis préalable à son départ en retrait, alors qu’eu égard à ses fonctions (assistance et de formation des élus aux comités d’entreprise et d’expertise auprès des CHSCT des entreprises clientes du cabinet), il ne pouvait théoriquement et pratiquement qu’avoir conscience du manquement de son employeur.

 

Le raisonnement de la Cour d’appel ne peut que surprendre puisqu’elle fonde son raisonnement sur la connaissance par le salarié du comportement litigieux de son employeur pour faire échec à la demande d’indemnisation, alors même qu’elle constate l’absence d’organisation des élections des délégués du personnel.

 

Le salarié a formé un pourvoi en cassation.

 

La Chambre sociale, rappelle que l’employeur qui n’a pas accompli, bien qu’il y soit légalement tenu, les diligences nécessaires à la mise en place d’institutions représentatives du personnel, sans qu’un procès-verbal de carence ait été établi, commet une faute qui cause un préjudice aux salariés, privés ainsi d’une possibilité de représentation et de défense de leurs intérêts.

 

La Cour de cassation confirme ainsi sa jurisprudence bien établie[2], selon laquelle seul le procès-verbal de carence peut justifier l’absence d’institutions représentatives dans l’entreprise ou l’établissement.

 

Dès lors, l’employeur qui n’est pas en mesure de produire le procès-verbal de carence, doit indemniser le salarié sans pouvoir exiger qu’il démontre et justifie l’existence de ce préjudice.

 

Au-delà de cette seule sanction pécuniaire, les entreprises n’ayant pas mis en place les élections professionnelles s’exposent à de lourdes conséquences (licenciement pour inaptitude, licenciement économique, négociation d’accord collectif, etc …).

 

En outre, le procès-verbal de carence ne dispense pas l’employeur d’organiser les élections professionnelles pour une durée indéterminée, en effet, si un salarié ou un syndicat en fait la demande, il a 6 mois pour procéder à de nouvelles élections.

 

[1]  Conformément aux dispositions de l’article L.2314-8 du Code du travail : l’employeur doit, dans le mois qui suit la demande, engager la procédure électorale.

 

[2] Cass. soc., 20 janv. 2015, n° 13-23.431 ou Cass. soc., 15 mai 2019, n° 17-22.224

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