Contrat de travail à temps partiel : quand l’obligation d’indiquer la répartition de la durée du travail se confronte à la liberté du règlement d’horaires variables

Christine MARTIN
Christine MARTIN - Avocat associée

SOURCE : Arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation du 17 novembre 2021, n°20-10.734 (FS-B)

 

Un salarié a été engagé par une société à compter du 1er septembre 2006 par contrat à durée déterminée à temps partiel puis par un contrat à durée indéterminée à temps partiel en qualité de Rédacteur.

 

Licencié le 1er avril 2016, il a saisi la juridiction prud’hommale le 9 décembre 2016 d’une demande de requalification de son contrat de travail à temps partiel en un contrat de travail à temps plein, et formulé des demandes subséquentes de rappels de salaire et de congés payés, outre diverses sommes à titre indemnitaire.

 

La Cour d’Appel de Lyon dans un arrêt du 26 octobre 2018, va débouter le salarié de sa demande de requalification de son contrat de travail à temps partiel en un contrat de travail à temps complet, considérant que l’horaire mensuel de 86,67 était prévu à son contrat de travail et que celui-ci prévoyait que les horaires seraient les suivants : 8h30 à 12h30 ou 14h30 à 18h00 selon le choix du salarié, ceci en raison de la mise en place dans l’entreprise d’horaires individualisés, système que le salarié n’avait pas remis en cause et qui lui laissaient la liberté d’organiser son temps de travail selon des plages d’horaires de matin ou d’après-midi, et qu’en outre le contrat de travail fixait une rémunération mensuelle pour un temps de travail moyen de 20h/semaine, soit 4h/jour.

 

En suite de cette décision, le salarié forme un pourvoi en cassation.

 

A l’appui de son pourvoi, il reproche à l’arrêt d’avoir refusé d’appliquer la présomption de temps complet résultant des dispositions de l’article L3123-14 du Code du Travail au terme desquelles le contrat écrit du salarié à temps partiel doit mentionner la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois.

 

Il prétend qu’en l’absence d’écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition, l’emploi est présumé être à temps complet et qu’il incombe à l’employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler, et qu’il n’avait pas à se tenir constamment à la disposition de l’employeur,

 

La Cour d’Appel a considéré que l’article L3121-48 du Code du Travail permet la mise en place d’horaires individualisés, organisation de son temps de travail que le salarié n’avait pas contesté au cours de sa relation de travail, et alors même que l’employeur ne lui avait pas imposé de déroger à cette liberté en organisant son temps de travail selon des plages de matin ou d’après-midi.

 

La chambre Sociale de la Haute Cour va suivre le salarié dans son argumentation.

 

Soulignant tout d’abord que le contrat de travail à temps partiel est un contrat écrit mentionnant la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois,

 

Qu’il en résulte qu’il ne peut-être dérogé par l’employeur à l’obligation de mentionner dans le contrat de travail à temps partiel la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois,

 

Elle relève que l’arrêt d’appel a débouté le salarié de sa demande de requalification, considérant la mise en place du dispositif d’horaires individualisés et que le contrat de travail précise que les horaires du salarié seront du matin ou de l’après-midi suivant le choix du salarié, celui-ci ne justifiant pas avoir remis en cause cette organisation de son temps de travail jouissant d’une très grande liberté dans l’organisation de son temps de travail, ce dont l’arrêt d’appel déduit qu’il ne peut reprocher à son employeur de ne pas avoir organisé la répartition du temps de travail à la semaine ou au mois.

 

Or en statuant ainsi alors qu’elle avait constaté que le contrat de travail ne mentionnait pas la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, la Cour d’Appel a violé les dispositions de l’article L3123-14 du Code du Travail.

 

Par suite, la Chambre Sociale de la Haute Cour casse et annule l’arrêt d’appel en ce qu’il a débouté le salarié de sa demande de requalification de son temps partiel en un temps complet.

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