Appréciation souveraine des actes de concurrence déloyale par les juges du fond

Virginie PERDRIEUX
Virginie PERDRIEUX

Source : Cour de cassation, Chambre commerciale, 28 novembre 2018, pourvoi n°17-24052

 

La société CFC a agi en contrefaçon de marques et concurrence déloyale à l’encontre de la société ISF, estimant que celle-ci avait copié sa marque en combinant le terme « Eagle Square » et un dessin figurant la silhouette d’une tête de rapace, vue de profil, en ombre chinoise, encadrée dans un cercle noir et épais, sur des produits identiques ou similaires offerts à la vente.

 

Aux termes de son pourvoi, la société CFC reproche aux premiers juges d’avoir rejeté sa demande au titre de la concurrence déloyale en ne reconnaissant pas une situation de concurrence entre les parties, alors que la situation de concurrence directe ou indirecte entre deux sociétés n’est pas une condition de cette action.

 

Surtout, elle estime que la décision déférée n’était pas suffisamment motivée, puisque la Cour d’appel se serait bornée à affirmer que la commercialisation d’articles de sportswear en molleton sous un logo représentant une tête d’aigle de profil n’était pas source de confusion sur l’origine des produits, faute de similitude suffisante entre les signes.

 

La demanderesse au pourvoi rappelle à ce titre le principe d’appréciation globale entre les signes en présence, permettant d’identifier ou non un risque de confusion du fait de la vente de produits similaires reproduisant un logo visuellement proche, de nature à créer un effet de gamme. Mais si ce principe existe en droit des marques, tel n’est pas le cas en matière de concurrence déloyale, le juge devant simplement caractériser l’existence de faits fautifs générateurs d’un préjudice.

 

La société CFC allègue encore de ce que la Cour d’appel n’aurait pas répondu à l’entièreté de son argumentation, notamment en se bornant à affirmer qu’elle ne démontrerait pas suffisamment la reproduction des caractéristiques de son modèle de vêtement, sans répondre précisément à la comparaison faite des modèles, ni s’expliquer sur leurs caractéristiques.

 

Aux termes de son arrêt du 28 novembre 2018, la Cour de cassation rappelle que la caractérisation d’actes de concurrence déloyale relève de l’appréciation souveraine des juges du fond, de sorte que la Cour d’appel était parfaitement fondée à retenir qu’il n’était pas suffisamment démontré que la société ISF aurait reproduit, dans ses propres modèles, les caractéristiques de celui commercialisé par la société CFC.

 

La Haute juridiction en profite également pour entériner un principe directeur pour apprécier des actes de contrefaçon, bien souvent objet d’errances de la part des juges du fond : « la similitude des produits ou services, au regard d’une action en contrefaçon de marque, n’implique pas que les produits incriminés reprennent les caractéristiques de ceux exploités sous la marque fondant cette action ».

 

En effet, alors qu’en droit des marques, la comparaison doit être opérée entre les signes et les produits et services tels qu’indiqués aux dépôts, en matière de concurrence déloyale, l’appréciation d’une faute supposera de comparer les produits ou services tels qu’effectivement exploités commercialement.

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