Taxe foncière et « base de vie » de chantier

Caroline DEVE
Caroline DEVE - Avocat

Le Conseil d’État juge sous certaines conditions que cette installation provisoire peut être assujettie à la taxe foncière sur les immeubles bâtis

Source :Conseil d’État 13/10/2023 n°463325, mentionné dans les tables du recueil Lebon

En vertu de l’article 1380 du code général des impôts : « La taxe foncière est établie annuellement sur les propriétés bâties sises en France à l’exception de celles qui en sont expressément exonérées par les dispositions du présent code ».

 Aux termes de l’article 1381 du même code : « Sont également soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties : / 1° Les installations destinées à abriter des personnes ou des biens ou à stocker des produits ainsi que les ouvrages en maçonnerie présentant le caractère de véritables constructions (…)/ 4° Les sols des bâtiments de toute nature et les terrains formant une dépendance indispensable et immédiate de ces constructions à l’exception des terrains occupés par les serres affectées à une exploitation agricole ».

Le critère principal pour déterminer si une construction est passible ou non de la taxe foncière sur les immeubles bâtis n’est pas tant qu’une construction n’ait pas vocation à être déplacée mais plutôt qu’elle soit fixée au sol « à perpétuelle demeure ».

Ainsi par exemple, s’agissant des mobil homes, le ministre de l’économie, des finances et de la relance a pu indiquer en 2021, dans une réponse ministérielle commentée dans le cadre de la présente newsletter, que la taxe foncière sur les immeubles bâtis peut être due le mobil home a perdu ses moyens de mobilité et si ses aménagements ne permettent pas un déplacement facile et rapide.

En l’espèce, la construction pour laquelle l’administration fiscale estimait que la taxe foncière sur les immeubles bâtis était due est une « base vie » installée pour les besoins d’un chantier afin d’installer des bureaux, des salles de réunions, des vestiaires, un réfectoire pour les ouvriers ainsi que le personnel encadrant.

Le Conseil d’État valide l’appréciation du service et des juridictions du fond quand bien même « ces ensembles modulaires devaient être retirés au terme du chantier et présentaient ainsi un caractère provisoire » dès lors que les éléments en cause « ne pouvaient être regardés, compte tenu de leurs caractéristiques, comme ayant vocation à être déplacés et que l’installation en cause constituait une installation destinée à abriter des personnes présentant le caractère d’une construction constitutive de propriété bâtie imposable à la taxe foncière sur les propriétés bâties au sens des dispositions de l’article 1381 du code général des impôts ».

Le Conseil d’Etat ainsi une interprétation extensive des dispositions en cause.

Il prend néanmoins soin de décrire précisément la construction litigieuse, relevant la superficie importante de la construction (1 584 m² de locaux + 2 140 m² de parking), ses aménagements (liaison aux réseaux, scellements en béton, allées bétonnées entre chaque rangée d’ensembles modulaires) ainsi que la difficulté pour démonter l’ensemble (intervention d’un semi-remorque et une grue de 35 tonnes).

On peut ainsi en déduire que la solution retenue n’est pas une solution de principe mais nécessite une étude au cas par cas. Cela a malheureusement pour conséquence d’introduire une insécurité juridique en la matière.

Print Friendly, PDF & Email
Partager cet article