Le juge administratif vient rappeler qu’une provision pour dépréciation du fonds de commerce peut être déductible fiscalement à la condition que le chiffre d’affaires et la rentabilité aient diminué de manière notable et que le contribuable puisse en apporter la preuve.
Tribunal administratif de Limoges, 1ère chambre, 18 juillet 2023, n° 2101935
Pour rappel, le CGI[1] prévoit qu’une entreprise peut valablement porter en provision et déduire des bénéfices imposables des sommes correspondant à des pertes ou charges qui ne seront supportées qu’ultérieurement par l’entreprise, à la condition que les pertes ou charges :
- Soient nettement précisées quant à leur nature et susceptibles d’être évaluées avec une approximation suffisante,
- Apparaissent comme probables eu égard aux circonstances de fait constatées à la date de clôture de l’exercice,
- Se rattachent aux opérations de toute nature déjà effectuées à cette date par l’entreprise.
En cas de contrôle, le contribuable doit pouvoir établir et justifier le montant de la provision compte tenu des caractéristiques de l’exploitation.
En l’espèce, une société exploite une officine de pharmacie. Le fonds de commerce acquis en 2005 a été inscrit à l’actif de son bilan pour un montant de 1 524 500 €. Au titre de l’exercice clos en 2017, la société a constitué une provision pour dépréciation du fonds de commerce à hauteur de 322 000 €.
A l’issue d’un contrôle, l’administration fiscale a réintégré le montant de la provision dans le bénéfice imposable résultant de ce fait des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés.
La société a demandé au tribunal administratif la décharge des impositions supplémentaires en invoquant notamment les facteurs d’évolution défavorable de l’environnement économique (baisse de la population du quartier d’implantation, fermeture de commerces au sein du centre commercial et une insécurité croissante).
Le tribunal administratif vient rappeler qu’une provision est déductible du résultat fiscal à la condition que, en plus des conditions rappelées ci-avant concernant les pertes ou les charges, la provision en cause ait été constatée dans les écritures de l’exercice conformément, en principe, aux prescriptions comptables. La dépréciation d’un élément d’actif, l’écriture comptable correspondante est subordonnée au constat selon lequel la valeur actuelle de cet élément d’actif, valeur la plus élevée de la valeur vénale ou de la valeur d’usage, est devenue notablement inférieure à sa valeur nette comptable.
La provision ne peut être déduire fiscalement si la valeur d’usage reste supérieure à cette valeur nette comptable, faisant ainsi obstacle à la comptabilisation d’une dépréciation.
Le tribunal administratif a rejeté la demande du contribuable en retenant les motifs suivants :
- le chiffre d’affaires constaté au titre de l’exercice clos en 2017, année de constitution de la provision, n’avait diminué que d’environ 15 % par rapport aux exercices clos en 2005 et en 2013 ;
- qu’au titre de l’exercice clos en 2017, le résultat net hors provision de 2017 était en augmentation d’environ 43 % par rapport à l’exercice clos en 2013 et en diminution de 10 % par rapport à l’exercice clos en 2005 ;
- le vérificateur n’a pas constaté de dégradation de la situation économique et financière de la société,
- le chiffre d’affaires et la rentabilité n’ont pas diminué de manière significative et ont également augmenté sur les exercices de 2018 et 2019 ;
- la hausse du résultat est liée à la progression de la marge commerciale.
Le tribunal administratif retient que la provision n’est pas fondée dès lors que les éléments apportés par la société ne permettent pas d’apporter la preuve que la valeur du fonds de commerce était devenue notablement inférieure à la sa valeur nette comptable.
[1] Articles 39 et articles 38 quater et 38 sexies de l’annexe III