Délai de prescription d’une action en requalification de contrats de mission

Patricia VIANE CAUVAIN
Patricia VIANE CAUVAIN - Avocat

Source : Cour de Cassation Sociale 30 juin 2021 n° 19-16655.

 

Par 5 arrêts publiés au Bulletin en date du 30 juin 2021, la Chambre Sociale de la Cour de Cassation Rappelle  que la durée de la prescription des actions dépend de la nature de la créance.

 

La Cour de Cassation s’est ainsi prononcée sur les délais de prescription à retenir lorsque la demande est fondée sur l’ invalidité d’une convention de forfait jours, sur la requalification d’un contrat de travail à temps partiel en un contrat de travail à temps complet, sur l’inégalité de traitement, une demande de gratification liée à une médaille du travail.

 

Dans l’espèce visée ci-dessus, un salarié travailleur intérimaire a été mis à disposition d’une entreprise utilisatrice moyennant 93 contrats de mission en un peu moins de 4 ans.

 

Le salarié saisit la juridiction prud’homale aux fins de solliciter la requalification de ses contrats de mission en contrat à durée indéterminée.

 

Il soutient que les contrats successifs ont eu en réalité pour objet de pallier l’activité normale et permanente de l’entreprise utilisatrice, entreprise de logistique.

 

Le salarié obtient gain de cause, l’entreprise utilisatrice est condamnée notamment à verser des sommes au titre de l’indemnité de requalification, l’indemnité légale de licenciement, des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

 

L’employeur forme un pourvoi devant la Cour de Cassation et reproche à la Cour d’Appel d’avoir rejeté ses fins de non-recevoir tirées de la prescription.

 

L’employeur considère en effet que le point de départ du délai de prescription de l’action en requalification fondée sur l’absence de justification par l’entreprise utilisatrice de la régularité du motif invoqué pour recourir au travail temporaire, est la conclusion du contrat de mission.

 

Il est reproché également à la Cour d’Appel d’avoir considéré, s’agissant de l’action en paiement des salaires que l’action introduite par le salarié pour obtenir paiement des salaires n’était pas prescrite.

 

La Cour de Cassation, au visa des articles L 1471-1 du Code du Travail dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, et L 1251-5 du Code du Travail juge que la Cour d’Appel a à juste titre déduit de la date du dernier contrat de mission et de la date d’introduction de l’action en requalification du contrat de mission laquelle a été introduite moins de deux ans après, que l’action n’était pas prescrite.

 

La Cour de Cassation se prononce ainsi sur le point de départ du délai de prescription applicable à l’action en requalification de contrats de mission en CDI et ses conséquences à savoir que le salarié peut se prévaloir des droits correspondant à un contrat à durée indéterminée au premier jour  de sa mission.

 

Les 4 autres arrêts concernaient :

 

  Un rappel de salaires fondé sur la nullité de la convention de forfait jours[1]:

 

La Cour de Cassation précise que la nature de la créance invoquée à savoir l’action en paiement d’un rappel de salaires permet de déterminer le délai de prescription de sorte que la demande d’invalidité de la convention de forfait jours ne peut être assujettie dans ce contexte aux délais de prescription de deux ans à compter de la signature de la convention litigieuse.

 

  La requalification d’un contrat à temps partiel en un contrat de travail à temps complet :

 

Dès que la créance, objet de la demande a une nature salariale c’est une prescription triennale qui doit être retenue[2]; Il en est de même d’une demande de rappel de salaires fondée sur une reclassification.

 

  Une demande de rappel de salaires fondée sur une atteinte au principe d’égalité de traitement :

 

La prescription triennale s’applique également[3].

 

  Une demande de gratification au titre de la médaille du travail :

 

Celle-ci n’est pas soumise à un délai de prescription de deux ans mais relève d’une prescription quinquennale dans la mesure où l’action a pour objet de réparer un préjudice né d’une discrimination[4].

 

[1] Cass Soc 18-23932

 

[2] Cass Soc 19-10161

 

[3] Cass Soc 20-12960

 

[4] Cass Soc 19-14543

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