Source : Cass. 3ème Civ. 19/12/2019 n° 18-26.162 – FS-PBI
L’Arrêt intervient dans un contexte de censure d’une Cour d’Appel qui, pour notre part, semble avoir commis un contresens dans la compréhension de la répartition des droits entre le nu-propriétaire et l’usufruitier.
Les voici ainsi succinctement en résumé :
Le nu-propriétaire est le tenant du droit de propriété, alors que l’usufruitier ne dispose que du démembrement du droit de propriété, d’user du bien (usus) et d’en tirer les fruits (fructus). Le périmètre des droits de chacun n’est pas toujours une tâche aisée, mais il faut admettre qu’en matière de baux commerciaux les choses semblaient claires, en tout cas, il aura fallu un rappel de la Cour de Cassation pour les repréciser à nouveau.
Le consentement ou le renouvellement d’un bail commercial est une prérogative de l’usufruitier qui nécessite cependant le concours du nu-propriétaire ou son autorisation ou, à défaut, celle du Juge[2]. En l’absence de l’autorisation du nu-propriétaire ou d’autorisation judiciaire permettant de s’en dispenser, le bail est nul[3].
Cette double autorisation étant édictée dans l’intérêt du nu-propriétaire, elle n’est pas exigée en cas de rupture du bail. Il est ainsi admis depuis longtemps que l’usufruitier peut exercer seul l’action en résiliation du bail commercial[4], délivrer congé au locataire[5] ou même notifier un refus de renouvellement du bail, puisque le refus de renouvellement du bail a les mêmes effets qu’un congé[6].
Le rappel de ces règles prétoriennes permet de se convaincre qu’en dehors des cas de nécessaire protection du nu-propriétaire lors des actes de disposition (et notamment lors du consentement ou du renouvellement d’un bail commercial) c’est bien l’usufruitier qui a la qualité de bailleur. Consécutivement, l’indemnité d’éviction due en cas de non renouvellement d’un bail commercial reste à sa charge.
Mieux vaut, sur ce point, prévenir et rappeler la règle, qu’avoir à guérir.
[1] Cass. 3ème Civ. 19/12/2019 n° 18-26.162 – FS-P-BI
[2] Article 595 du Code Civil ou Cass. 3ème Civ. 24 mars 2019 n° 07-18.856
[3] Voir notamment Cass. 3ème Civ. 19/10/2017 n° 16-19.843
[4] Cass. 3ème Civ. 04 mai 1976 n° 74-13.538, bull. civ. III n° 186
[5] Cass. 3ème Civ. 29/01/1974 n° 72-13.968
[6] Cass. 3ème Civ. 09/12/2009 n° 08-20.512, publié au bulletin