SOURCE : Cass. Com., 4 février 2014, n°12-25528, F-D
Il est de jurisprudence, maintenant constante, qu’un fonds de commerce existe dès lors qu’il dispose d’une clientèle propre, peut importe où il est exploité[1]. La Cour d’appel d’Aix en Provence, par un arrêt du 18 novembre 2011, avait ainsi condamné un locataire gérant qui contestait l’existence d’une telle convention puisque l’activité était exploitée sur le domaine public. Ce qui avait été implicitement admis par la Cour de cassation, qui avait toutefois cassé l’arrêt pour manque de base légale : pour qu’il y ait fonds de commerce, encore faut-il que le loueur démontre que le fonds disposait d’une clientèle propre, distincte de celle de la structure publique où elle était exercée, question sur laquelle la Cour d’appel ne s’était pas penchée.
Si la question du lieu d’exploitation accorde la Cour d’appel d’Aix en Provence et la Chambre commerciale de la Cour de cassation, celle du mode d’exploitation de l’activité divise…
En l’espèce, un marchand ambulant jouissant d’une autorisation administrative d’exploitation de son activité sur le marché municipal, prend sa retraite, laissant à son épouse le soin de poursuivre l’activité. Dans le cadre du divorce des époux, le mari a reproché à sa femme d’avoir commis des fautes à l’origine de la disparition du fonds, et considérait qu’elle était dès lors redevable de la valeur du fonds à son égard.
Pour la Cour d’appel d’Aix en Provence, l’activité de marchand ambulant est exercée en vertu d’une autorisation délivrée par les autorités administratives intuitu personae au commerçant, et qu’en aucun cas elle ne pouvait être qualifiée de fonds de commerce et n’est pas cessible.
La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel :
« Attendu que pour rejeter la demande de M. X… en paiement par Mme Y… d’une certaine somme au titre de la valeur du fonds de commerce de vente ambulante de volailles, l’arrêt retient, par motifs adoptés, que l’activité non cessible de marchand ambulant, qui est exercée en vertu d’une autorisation administrative personnelle et dont la clientèle est attachée au marché et non au commerçant, ne peut en aucun cas constituer un fonds de commerce ;Attendu qu’en se déterminant ainsi, sans rechercher, si, bien que la concession d’un emplacement sur un marché municipal dont il était bénéficiaire fût un bien hors commerce, ni cessible, ni saisissable, M. X… ne pouvait être détenteur d’un fonds de commerce auquel était attachée une clientèle, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision »
En d’autres termes, pour la Cour de cassation, peu importe le titre aux termes duquel l’activité est exploitée : il y a fonds de commerce dès que ses éléments constitutifs sont réunis, notamment l’exploitation d’une clientèle propre.
La Cour de cassation renvoi donc l’affaire devant la Cour d’appel d’Aix en Provence laquelle, sauf surprise, relèvera, comme dans son arrêt du 31 mai 2012 relative à l’espèce ici commentée, que « dans le cadre du commerce ambulant, la clientèle ne peut être considérée comme attachée au commerçant mais est attachée au commerce considéré ».
Sylvain VERBRUGGHE
Vivaldi-Avocats
[1] Sur le sujet, cf notre article du 10 octobre 2013