Source : Cass. Soc. 8 juillet 2020 n°19-10.534
Les conséquences attachées à l’annulation d’une décision de l’Inspecteur du Travail autorisant le licenciement d’un salarié protégé sont souvent extrêmement lourdes pour l’employeur.
En l’espèce, un salarié protégé, délégué syndical, membre titulaire du Comité d’Entreprise, candidat au CHSCT et Conseiller Prud’homal est licencié pour faute grave après autorisation de l’Inspecteur du Travail.
La Cour Administrative d’Appel saisie par le salarié d’une demande d’annulation de la décision d’autorisation fait droit à sa demande …. trois ans plus tard.
Le recours de l’entreprise devant le Conseil d’État n’est pas jugé recevable ; l’arrêt rendu par la Cour Administrative d’Appel est devenu définitif.
Le salarié obtient ainsi sa réintégration trois ans après son licenciement., sur le fondement de l’article L 2422-1 du Code du Travail.
Cet article prévoit que « lorsque le ministre compétent annule sur recours hiérarchique la décision de l’Inspecteur du Travail autorisant le licenciement d’un salarié ou lorsque le Juge Administratif annule la décision d’autorisation de l’Inspecteur du Travail ou du Ministre compétent, le salarié protégé a droit s’il le demande dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision d’être réintégré dans son emploi ou dans un emploi équivalent ».
L’employeur met de nouveau en œuvre une procédure de licenciement et obtient une nouvelle autorisation administrative fondée sur les mêmes faits.
Le salarié qui avait saisi entretemps la juridiction prud’homale, demande et obtient une indemnisation correspondant à la réparation du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration ; l’employeur est condamné à lui verser une somme non négligeable, soit un peu plus de 60.000 € après déduction des allocations chômage qu’il a perçues.
L’employeur se pourvoit en cassation, considérant que l’indemnisation du préjudice subi entre le licenciement du salarié protégé et sa réintégration n’avait pas lieu d’être dès lors qu’il a repris la même procédure de licenciement.
Il maintient de surcroît que la décision d’autorisation de licenciement n’est pas définitive.
L’article L2422-4 du Code du Travail précise qu’en cas d’annulation d’une autorisation devenue définitive, le salarié a droit au paiement d’une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration.
La Cour de Cassation opère une stricte application de cet article, considération prise de l’existence de deux procédures, une première devenue définitive dès lors qu’elle ne peut plus faire l’objet d’un quelconque recours, qui a abouti à la réintégration du salarié, la seconde à savoir la reprise de la procédure de licenciement pour les mêmes faits étant sans conséquence sur le caractère définitif de la décision.
L’existence d’une seconde procédure et d’une autorisation administrative pour les mêmes faits, ne régularise pas le licenciement prononcé sur la base de l’autorisation annulée.
La Cour de Cassation rappelle sa jurisprudence et notamment un arrêt en date du 10 décembre 1997[1] par lequel elle s’était déjà prononcée sur la question.
Le pourvoi de l’employeur est en conséquence rejeté et le salarié peut percevoir les salaires couvrant la période entre son licenciement et sa réintégration, déduction faite des allocations chômage qu’il a perçues.
[1] Cass. Soc. 10 décembre 1997, 94-45.337