Cautionnement, formalisme légal, et consentement éclairé de la caution

Thomas LAILLER
Thomas LAILLER

Source : Cass. com. 23 octobre 2019, n° 18-13.888, F-D

 

I – L’espèce

 

Une banque accorde un prêt à une société, prévoyant une garantie Oseo et le cautionnement solidaire du dirigeant de la société pour 50 % du prêt, soit 123 800 €. Le dirigeant se porte caution à hauteur de 127 000 €.

 

Poursuivi par la banque après la défaillance de la société, le dirigeant prétend que son engagement est nul, car consenti pour un montant supérieur à celui prévu par l’acte de prêt. Pour la banque, cette discordance n’est pas une cause de nullité et la condamnation de la caution doit être réduite à la moitié des sommes due par la société emprunteuse.

 

La cour d’appel rejette l’action en paiement contre la caution, au motif que les articles L 341-2 et L 341-3 du Code de la consommation exigent, au-delà de leur caractère formel, la démonstration de l’existence d’un consentement éclairé de la caution aux obligations qu’elle souscrit, lequel aurait manifestement fait défaut en l’espèce.

 

II – Le pourvoi

 

La Cour régulatrice censure. Si le Code de la consommation impose la reproduction de mentions dans le cautionnement donné par une personne physique à un créancier professionnel, il n’exige pas de contrôler, en présence de mentions conformes, le consentement de la caution.

 

Le cautionnement souscrit par une personne physique au profit d’un créancier professionnel est soumis à un formalisme rigoureux : la caution doit écrire de sa main, dans l’acte de cautionnement, une mention dont les termes, fixés par la loi, explicitent la portée et l’étendue de l’engagement et, le cas échéant, une mention légale supplémentaire si la caution s’engage solidairement avec le débiteur. La première mention est requise à peine de nullité du cautionnement et la seconde, à peine de nullité de la seule stipulation de solidarité, dans la mesure toutefois où la première mention a été régulièrement portée sur l’acte de cautionnement. La même sanction s’applique si les mentions ne sont pas conformes aux exigences légales. Un dispositif similaire est prévu lorsqu’une personne physique se porte caution d’une opération relevant de la réglementation du crédit à la consommation ou immobilier (C. consom. art. L 314-15 et L 314-16). La solution ici retenue lui est transposable.

 

Si les mentions apposées sur le cautionnement sont conformes aux exigences légales, cet engagement est valable au regard des textes précités, mais seulement de ceux-ci. Même si ces textes tendent à s’assurer que la caution s’est engagée en connaissance de cause, ils n’ont pas pour objet de s’assurer de l’intégrité du consentement donné par la caution. Rien n’interdit à celle-ci d’invoquer son absence de consentement à l’acte (C. civ. art. 1128, 1o), que son consentement a été vicié par une erreur, par un dol ou par une violence émanant du créancier (art. 1130 s.) ou encore qu’elle a souscrit l’engagement sous l’empire d’un trouble mental (art. 1129 et art. 414-1).

 

Mais en l’espèce, la cour d’appel avait annulé le cautionnement pour dol en raison seulement de la discordance entre le montant du cautionnement prévu par l’acte de prêt et celui de l’engagement effectivement souscrit. La Cour de cassation a, là aussi, censuré la décision, reprochant à la cour d’appel de n’avoir pas caractérisé les manœuvres dolosives de la banque qui auraient été effectuées dans le but de tromper la caution sur un élément déterminant de son engagement.

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