SOURCE : Arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation du 03 octobre 2018, n° 16-19.836 (F-P+B).
Un salarié a été embauché dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée le 04 septembre 2001 en qualité de responsable administratif « montage décor » relevant du statut cadre au forfait jour par une entreprise de plasturgie réalisant des présentoirs destinés à l’exposition de produits, appliquant la convention collective de la plasturgie.
A partir de mars 2003, le salarié va exercer des fonctions de représentant du personnel.
Le 07 avril 2006, l’intitulé de son poste devient responsable administratif « atelier » et il va être muté à compter du 11 février 2009 au service logistique en qualité de responsable « réception ».
Reprochant à son employeur d’avoir modifié ses fonctions alors qu’il était délégué du personnel et d’avoir supprimé la prime de fin d’année, le salarié, considérant être harcelé, a saisi le Conseil des Prud’hommes de POISSY afin d’obtenir la résiliation de son contrat de travail et le paiement de diverses sommes.
Il sera, quelques mois plus tard, licencié pour faute grave par son employeur.
S’il a été débouté par les premiers Juges de l’ensemble de ses demandes, la Cour d’Appel de VERSAILLES, saisie de cette affaire, va, dans un Arrêt du 04 mai 2016, accueillir la demande de résiliation du contrat de travail du salarié aux torts de l’employeur.
En effet, la Cour relève :
– que le salarié a fait l’objet d’une rétrogradation de ses fonctions et que l’employeur avait supprimé la prime exceptionnelle versée annuellement sans dénoncer de manière régulière cet usage,
– que face à ces deux manquements de l’employeur à ses obligations qu’il n’a pas régularisés, nonobstant les protestations du salarié demandant à être réintégré dans ses anciennes fonctions,
Par suite, la Cour d’Appel considère que ce manquement de l’employeur, en ce qu’il a porté atteinte au statut de salarié protégé du salarié, était d’une gravité telle qu’il empêchait la poursuite du contrat, ce qui rend bien fondée la demande de résiliation qui, en conséquence, prend effet à la date du licenciement prononcé par l’employeur.
La Cour relève, en conséquence, que la résiliation judiciaire du contrat de travail prononcé aux torts de l’employeur, notamment pour violation du statut protecteur produit les effets d’un licenciement nul.
Or, la Cour relève également que si l’annulation d’un licenciement permet effectivement au salarié de solliciter une telle mesure, il convient de rappeler que la rupture du contrat est alors à l’initiative du l’employeur.
Mais la Cour d’Appel relève qu’au cas présent, le salarié ne saurait demander tout à la fois la résiliation de son contrat, c’est-à-dire la rupture du lien contractuel aux torts de son employeur et sa réintégration dans l’entreprise qui suppose, au contraire, son rétablissement, de sorte qu’en conséquence, la Cour d’Appel rejette la demande de réintégration du salarié comme étant incompatible et contradictoire avec la demande de résiliation présentée à titre principal.
Ensuite de cette décision, le salarié forme un pourvoi en Cassation.
A l’appui de son pourvoi, il reproche à l’Arrêt d’appel d’avoir rejeté sa demande de réintégration, prétendant que sa demande de résiliation judiciaire n’avait pas pour objet d’obtenir la rupture du contrat de travail déjà consommée, mais de faire supporter les conséquences de cette rupture à l’employeur en raison des manquements à ses obligations contractuelles, et qu’il n’y a, dans cette hypothèse, aucune incompatibilité entre le maintien d’une demande en résiliation judiciaire du contrat de travail et la demande de réintégration, dès lors que la résiliation judiciaire produit les effets d’un licenciement nul.
Mais la Chambre Sociale ne va pas suivre le salarié dans son argumentation.
Elle énonce que le salarié ayant maintenu à titre principal sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail en raison de la violation de son statut protecteur, la Cour d’Appel qui a accueilli cette demande de résiliation judiciaire du contrat de travail a pu rejeter la demande de réintégration présentée par le salarié et faire droit à ses demandes subsidiaires d’indemnisation.
Par suite, la Chambre Sociale rejette le pourvoi.
Christine MARTIN
Associée
Vivaldi-Avocats