Société en formation et promesse d’embauche ne font pas toujours bon ménage.

Christine MARTIN
Christine MARTIN - Avocat associée

SOURCE : Cass Soc., 19 novembre 2014, Arrêt n°2065 FS- D (n° 13-19.483).

On sait que les engagements pris par les associés fondateurs d’une société en formation obligent, conformément aux dispositions de l’article 1843 du Code Civil, les personnes ayant agi au nom de la Société en formation, la société ayant la possibilité, une fois son immatriculation réalisée, de reprendre les engagements souscrits par elle pendant la période de formation, lesdits engagements étant alors réputés avoir été souscrits dès l’origine par la société.

Il s’agit, en général, d’engagements contractuels pris par les futurs associés au nom et pour le compte de la société en formation.

Mais que se passe-t-il lorsque l’un des futurs associés signe une promesse d’embauche au nom et pour le compte d’une société en formation qui finalement ne sera pas créée ?

C’est précisément la question qui était posée à la Cour de Cassation dans cet Arrêt de la Chambre Sociale du 19 novembre 2014.

Dans cette espèce, par un écrit du 14 mars 2008, un Avocat s’était engagé à embaucher à compter du 1er septembre 2008, une secrétaire au sein d’une société civile de moyen qu’il devait créer avec un Confrère.

Cet engagement n’ayant pas été rempli, dans la mesure où la société n’avait finalement pas été constituée, la secrétaire avait saisi les Juridictions Prud’homales pour faire juger que le non-respect de la promesse d’embauche s’analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, réclamant ainsi le versement de dommages et intérêts.

La Cour d’Appel de CHAMBERY, dans un Arrêt du 31 janvier 2013, considérant que l’engagement de l’Avocat, indivisible de celui de son Confrère, a été pris en qualité de futur associé de la société qui aurait été l’employeur de la salariée, de sorte que celle-ci ne peut opposer la promesse exclusivement à l’Avocat l’ayant signée et qu’en outre ce document constituait une promesse unilatérale d’embauche ayant expiré alors que la salariée n’avait pas levé l’offre d’emploi pendant sa durée de validité, va débouter la salariée de ses demandes.

Par suite, celle-ci se pourvoit en Cassation.

Bien lui en prit, puisque la Chambre Sociale, dans l’Arrêt précité du 19 novembre 2014, va considérer que l’écrit qui précise l’emploi proposé et la date d’entrée en fonction constitue une promesse d’embauche obligeant le promettant envers le bénéficiaire, de sorte que la Cour d’Appel n’était pas fondée, pour débouter la salariée, à invoquer l’absence de signature de la promesse d’embauche par l’une des personnes qui devait faire partie des associés de la future société.

Par suite, la Chambre Sociale casse et annule l’Arrêt rendu dans toutes ses dispositions et renvoie les parties devant la Cour d’Appel de LYON.

On remarquera que, dans ce cas précis, la Chambre Sociale a considéré que l’écrit qui précise l’emploi proposé et la date d’entrée en fonction constituent une promesse d’embauche obligeant le promettant envers le bénéficiaire, sans toutefois préciser si ladite promesse constitue un réel contrat de travail, contrairement à ses précédentes décisions en la matière.

Il est vrai que le cas d’espèce est un peu particulier puisque s’agissant d’une société en formation n’ayant finalement jamais été constituée, considérer que c’était formé un véritable contrat de travail, reviendrait à substituer à l’employeur initialement convenu un nouvel employeur redevable de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

On attend donc avec impatience la décision qui sera rendue par la Cour d’Appel de LYON, Cour d’Appel de renvoi dans cette affaire.

Mais plus que jamais les associés fondateurs de sociétés en formation doivent se montrer vigilants quant aux engagements contractuels pris au nom de la société en formation, l’effet « boomerang » pouvant se révéler particulièrement sévère.

Christine MARTIN

Associée

Vivaldi-Avocats

 

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