Cass.Com., 25 janvier 2023, n°21-16275, n°84 B
La déclaration de créance née d’un billet à ordre à la procédure collective du souscripteur interrompt la prescription à l’égard de l’avaliste.
Partons d’un acquis, l’article L511-21 du Code de commerce repris comme suit (et qui renvoie à l’article L512-4 du même code) :
« Le paiement d’une lettre de change peut être garanti pour tout ou partie de son montant par un aval.
Cette garantie est fournie par un tiers ou même par un signataire de la lettre.
L’aval est donné soit sur la lettre de change ou sur une allonge, soit par un acte séparé indiquant le lieu où il est intervenu.
Il est exprimé par les mots ” bon pour aval ” ou par toute autre formule équivalente ; il est signé par le donneur d’aval.
Il est considéré comme résultant de la seule signature du donneur d’aval apposée au recto de la lettre de change, sauf quand il s’agit de la signature du tiré ou de celle du tireur.
L’aval doit indiquer pour le compte de qui il est donné. A défaut de cette indication, il est réputé donné pour le tireur.
Le donneur d’aval est tenu de la même manière que celui dont il s’est porté garant.
Son engagement est valable, alors même que l’obligation qu’il a garantie serait nulle pour toute cause autre qu’un vice de forme.
Quand il paie la lettre de change, le donneur d’aval acquiert les droits résultant de la lettre de change contre le garanti et contre ceux qui sont tenus envers ce dernier en vertu de la lettre de change. »
Une banque octroie à une société des crédits destinés à sa trésorerie. L’application des contrats implique l’émission de trois billets à ordre avalisés au bénéfice de la Banque comme suit :
- Le premier le 31 octobre 2013, d’un montant de 50 000 euros, à échéance du 30 novembre 2013,
- Deux autres, le 30 avril 2014, respectivement de 25 000 euros et de 75 000 euros, tous deux à échéance du 31 mai 2014.
Le Tribunal de commerce placera la société en liquidation judiciaire le 18 juin 2014.
Diligente, la banque déclarera ses créances et assignera le donneur d’aval, en exécution de ses engagements le16 mars 2017.
Le débat portera sur la prescription, la société considérant que la banque est prescrite dans ses demandes. Si la Cour refuse de voir la prescription, elle prononcera la nullité des deux derniers billets à ordre au motif que l’aval a été donné de mauvaise foi dans le seul but d’échapper aux conséquences de la procédure collective qui s’annonçait inévitable.
Un pourvoi est alors formé par toutes les parties au litige permettant à la Cour de rappeler que selon l’article 2246 du Code civil, applicable au donneur d’aval, l’interpellation faite au débiteur principal interrompt le délai de prescription contre la caution. Aux termes de l’article 130, devenu L. 511-21, du code de commerce, auquel renvoie l’article 187, devenu L. 512-4, du même code, le donneur d’aval d’un billet à ordre est tenu de la même manière que celui dont il s’est porté garant. Il en résulte que la déclaration de la créance née d’un billet à ordre au passif de la procédure collective de son souscripteur interrompt la prescription à l’égard du donneur d’aval.
Si aucune solution nouvelle n’est apportée, cette décision est un rappel simple, mais efficace des règles cambiaires s’imbriquant dans le droit des entreprises en difficulté. Attention donc aux délais, mais également à la forme entourant l’usage de tels instruments.