Source : CA Versailles 24 septembre 2015 n° 15/03435, 13e ch.
Par un important arrêt du 4 novembre 2014[1], la Cour de Cassation a rappelé qu’une action en sanction à l’encontre d’un débiteur personne physique ou d’un dirigeant d’un débiteur personne morale se prescrit par 3 ans à compter du jugement d’ouverture de la procédure collective (L653-1 du Code de Commerce). S’agissant à ce titre des procédures de redressement judiciaire converties ultérieurement en liquidation, le point de départ est bien le jugement d’ouverture du RJ, et non celui de la LJ.
L’article L653-6 dispose quant à lui que :
« Le tribunal peut prononcer la faillite personnelle du dirigeant de la personne morale ou de l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée qui n’ont pas acquitté les dettes mises à leur charge en application de l’article L. 651-2. »
C’est-à-dire qu’indépendamment de l’action en sanctions personnelles, le dirigeant peut être poursuivi pour n’avoir pas payé les condamnations mises à sa charge au titre des sanctions pécuniaires, c’est-à-dire les condamnations à combler l’insuffisance d’actif.
La question s’est ici posée de la prescription de cette action en faillite personnelle, et plus important encore, de son point de départ.
La Cour d’Appel retient la solution selon laquelle, l’article L653-1 trouve ici aussi à s’appliquer. C’est-à-dire que cette action se prescrit elle-aussi par 3 ans, à compter du jugement d’ouverture de la procédure collective.
Cette solution, si elle devait être confirmée par la Cour de Cassation, est particulièrement favorable au dirigeant.
En effet :
– Comme il a été rappelé, le point de départ de la prescription, en cas de RJ précédant une LJ, est le jugement d’ouverture du redressement. En pratique, l’organe souhaitant assigner en sanctions a d’ores et déjà perdu plusieurs mois.
– Ensuite, l’action en sanctions (initiale) peut elle-même prendre du temps. Il est usuel de constater des délais de l’ordre de 6 mois à 1 an, par degré de juridiction.
– Enfin, en cas de condamnation du dirigeant à combler l’insuffisance d’actifs, encore faudra-t’il constater le défaut d’exécution par le dirigeant, et corrélativement engager l’action prévue à l’article L653-6.
Ainsi, et en pratique, les chances, pour les organes de la procédure, de ne pas être prescrits au jour où ils constateront le défaut d’exécution par le dirigeant condamné, sont quasiment nulles.
On est là très loin de l’ancienne durée de prescription de l’action en faillite personnelle applicable antérieurement à la Loi de Sauvegarde, qui était alors de… 30 ans.
Etienne CHARBONNEL
VIvaldi-Avocats
[1] cf notre article du 9 janvier 2015 : “Le point de départ du délai de prescription de l’action en sanction.”