Source : Cass.3ème Civ., 13 février 2020, n°19-10.249
C’est ce que précise la Troisième Chambre Civile de la Cour de Cassation, dans cette décision, publiée au bulletin, comme suit :
« ….
(…)
La société Areas dommages, société d’assurance mutuelle, dont le siège est […] , a formé le pourvoi n° G 19-10.249 contre l’arrêt rendu le 5 novembre 2018 par la cour d’appel de Toulouse (1re chambre, section 1), dans le litige l’opposant :
1°/ à M. S… W…, domicilié […] ,
2°/ à M. B… G…, domicilié […] ,
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Pronier, conseiller, les observations de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de la société Areas dommages, de Me Isabelle Galy, avocat de M. W…, et l’avis de M. Burgaud, avocat général référendaire, après débats en l’audience publique du 14 janvier 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Pronier, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, M. Nivôse, Mmes Farrenq-Nési, Greff-Bohnert, MM. Jacques, Bech, Boyer, conseillers, Mmes Guillaudier, Georget, Renard, Djikpa, conseillers référendaires, M. Burgaud, avocat général référendaire, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt attaqué (Toulouse, 5 novembre 2018), M. W… a confié à M. G…, assuré en responsabilité décennale auprès de la société Areas dommages, la réalisation de travaux d’enduit de façades.
2. Des fissures étant apparues, M. W… a, après expertise, assigné M. G… et la société Areas dommages en indemnisation de ses préjudices.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
3. La société Areas dommages fait grief à l’arrêt de la condamner, in solidum avec M. G…, à payer à M. W…, au titre des désordres affectant les façades, la somme de 52 792,76 euros et de la condamner à garantir M. G… des condamnations prononcées à son encontre, alors :
« 1°/ que le juge doit, en toute circonstance, faire observer et observer lui-même le principe de contradiction ; qu’il ne peut fonder sa décision sur des moyens de droit qu’il a relevés d’office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que la cour d’appel, pour retenir la présence de désordres décennaux au sens des articles 1792 et 1792-2 du code civil, a écarté la qualification d’ouvrage propre mais s’est fondée sur la jurisprudence de la Cour de cassation issue de l’arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation du 15 juin 2017 en qualifiant l’enduit
litigieux d’élément d’équipement notamment compte tenu de sa fonction d’imperméabilisation ; qu’en relevant d’office ce moyen, sans inviter les parties à s’en expliquer, la cour d’appel n’a pas respecté le principe du contradictoire et, partant, a violé l’article 16 du code de procédure civile ;
2°/ que seuls les désordres affectant des éléments d’équipement, dissociables ou non, d’origine ou installés sur existant, relèvent de la responsabilité décennale lorsqu’ils rendent l’ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination ; que la pose d’un enduit, qui constitue un ouvrage lorsqu’il a une fonction d’étanchéité, ne constitue pas un élément d’équipement, même s’il a une fonction d’imperméabilisation ; que la cour d’appel a constaté que les désordres ont affecté un enduit monocouche d’imperméabilisation et de décoration des parois verticales n’assurant aucune fonction d’étanchéité particulière ; que la cour d’appel, pour juger que les désordres affectant l’enduit et rendant l’ouvrage existant impropre à sa destination engageaient la responsabilité décennale de M. G…, a jugé que l’enduit constituait un élément d’équipement dès lors que sa composition lui conférait un rôle d’imperméabilisation et non pas purement esthétique ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé l’article 1792 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu l’article 1792 du code civil :
4. Tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage, des dommages, même résultant d’un vice du sol, qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination. Une telle responsabilité n’a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d’une cause étrangère.
5. En application de ce texte, un enduit de façade, qui constitue un ouvrage lorsqu’il a une fonction d’étanchéité (3e Civ., 4 avril 2013, pourvoi n° 11-25.198, Bull. 2013, III, n° 45), ne constitue pas un élément d’équipement, même s’il a une fonction d’imperméabilisation, dès lors qu’il n’est pas destiné à fonctionner.
6. Pour accueillir les demandes, l’arrêt retient que l’enduit litigieux, auquel sa composition confère un rôle d’imperméabilisation, constitue un élément d’équipement et est susceptible d’ouvrir droit à garantie décennale si le désordre trouvant son siège dans cet élément d’équipement a pour effet de rendre l’ouvrage, en son entier, impropre à sa destination, le caractère dissociable ou indissociable de l’élément d’équipement important peu à cet égard.
7. En statuant ainsi, la cour d’appel a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur la première branche du moyen, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 5 novembre 2018, entre les parties, par la cour d’appel de Toulouse ;… »